Présentation.
Voici un article qui a la dimension d’une brochure et pourrait donc en devenir une, si suffisamment de camarades le permettent, pour qu’elle soit diffusée et, surtout, discutée.
Comme le rappelle son préambule, il a été suscité par une discussion mettant en relation la guerre de Poutine contre l’Ukraine, la seconde guerre mondiale et l’orientation politique méconnue que Trotsky avait commencé à formuler dans celle-ci, et qui ne fut pas celle des trotskystes : la politique militaire du prolétariat (PMP, bien que ce sigle soit en réalité une création de James P. Cannon qui ne l’avait pas comprise).
Il se trouve que j’y porte la dernière main ce 21 août 2022, jour anniversaire de la mort de Léon Trotsky suite au coup de piolet qui, la veille, a mis fin à son activité politique. Or, il avait juste auparavant écrit quelques lignes fort intéressantes sur cette « PMP » qui sont sa dernière contribution. Voyons, en cela, un hasard objectif digne de nous inspirer.
Ceci n’est pas une contribution de nature en premier lieu historique. La conclusion de cet article en donne la raison d’être politique. La voici :
« Une politique militaire prolétarienne n’a de sens et ne peut finalement exister qu’orientée sur la question du pouvoir, comme Trotsky le notait, quelques heures avant son assassinat : il ne s’agit pas de s’auto-congratuler dans le rôle de l’opposition d’extrême-gauche de l’ordre existant, il s’agit d’être candidats au pouvoir, c’est-à-dire d’aider le mouvement réel du prolétariat à s’emparer du pouvoir. Lorsque ce mouvement en vient à réclamer des armes, à s’en procurer, à imposer qu’on lui en distribue, cette question est à l’horizon. C’est pourquoi la grande leçon de la PMP, c’est aussi la mise en relation de la question des armes avec celle de la démocratie, des mots d’ordre démocratiques posant la question du pouvoir, de quelle classe dirige, tel que l’assemblée constituante. Plus la guerre ukrainienne sera une guerre populaire, plus les véritables internationalistes l’aideront à se développer en ce sens en combattant pour son armement, plus elle aboutira à la question de la nature de l’Etat à l’issue de la guerre, la question du pouvoir.
Ni monde « multipolaire », ni statu quo « occidental » : révolution prolétarienne démocratique et écosocialiste de la majorité du genre humain pour sauver la possibilité d’un avenir. La signification de l’engagement de militants et de courants de diverses provenances dans le soutien à la résistance « armée et non armée » du peuple ukrainien, c’est cela. L’internationalisme aujourd’hui, c’est donc leur regroupement. »
Mais c’est bien la compréhension de l’histoire qui nourrit nos moyens d’action présents. Cet article y revient à un double niveau : il comporte une relecture de la seconde guerre mondiale avec des faits connus et d’autres qui le sont moins ou pas du tout et qui en font, non pas seulement une guerre impérialiste, mais une guerre prolétarienne de libération qui poussait sous et contre la guerre officielle ; et il examine le contraste entre cette situation, l’analyse qu’en avait dessinée Trotsky lorsqu’il fut assassiné, et l’action des trotskystes, ce qui conduit à une réflexion sur la réalité de ce « trotskysme », que je poursuis dans quelques lignes traitant du retour malsain de ce qui a été alors refoulé, par exemple dans la « révolution-guerre » d’un certain Michel Pablo puis dans la « ligne de la guérilla » en Amérique latine. Cette réflexion est nécessaire mais on ne refait pas l’histoire après coup : elle est nécessaire pour le présent, et donc pour l’avenir.
J’ose espérer que le lecteur curieux apprendra bien des choses, allant de la nature des rares mouvements de masse prenant la défense des Juifs contre les nazis, à la façon dont Natalia Sedova-Trotsky a commencé à s’opposer à ses camarades, en passant par l’histoire du grand chinois Chen Duxiu jusqu’au rôle de telle ou telle figure tutélaire de courants trotskystes futurs alors dans son jeune âge. Je ne me fais pas d’illusions, ceci dit, sur ceux qui à présent nous traitent au mieux de militaristes et au pire d’agents de la CIA : de poids morts de l’histoire, ils sont en train de devenir des partisans du repartage impérialiste et barbare du monde.
Nous ne sommes pas des militaristes, et c’est pourquoi nous appelons à comprendre pourquoi « le fusil » est une nécessité :
« Eh bien non, pour les révolutionnaires prolétariens, même militaristes, le pouvoir n’est pas au bout du fusil, et c’est absolument capital. Le pouvoir dépend du degré d’organisation, de conscience et de lutte du prolétariat dont l’émancipation ne peut être que l’auto-émancipation. Ceci implique, malheureusement, le fusil et les armes. Mais le pouvoir n’est pas au bout. Le pouvoir, fusil compris, est au bout de la conscience, de la lutte et de l’organisation. Croire que le pouvoir est au bout du fusil, c’est exproprier les masses, les prolétaires, les êtres humains. C’est le contraire de la révolution. »
Que ce travail, avec ses insuffisances, soit lu et discuté, et soit dédié à nos jeunes camarades ukrainiens antimilitaristes engagés dans la résistance populaire armée et non armée, dont ceux et celles qui ont pris le fusil, qui sont tombés ou sont aux mains de l’ennemi. Ils ont agi sous la nécessité, ils forcent les révolutionnaires du monde à remettre leurs pendules à l’heure, ils sont notre avenir, celui de l’humanité en guerre pour son avenir. Le proche avenir.
VP, le 21/08/2022.
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Sommaire
Présentation
La « PMP » de Trotsky.
- Pourquoi Trotsky ?
- Les prémisses.
- Les documents de la PMP, été 40.
- Le dernier jour.
- Ce qu’il en était.
- Questions.
Sous la seconde guerre mondiale, la guerre révolutionnaire du prolétariat.
- Avant juin 40.
- 40 en Grande-Bretagne, c’est 36 !
- Grèce, Albanie, Yougoslavie.
- Barbarossa.
- Les PC des Balkans prennent une place à part.
- Maquis et partisans.
- La question de la défense des Juifs et de l’autodéfense juive.
- Darlan, Giraud, De Gaulle … Badoglio.
- La révolution italienne contenue et ses leçons.
- L’implosion des forces italiennes d’occupation.
- L’armée grecque du Caire : avertissement.
- Front Est.
- Le III° Reich craque mais tient.
- Le débordement par le Sud-Est.
- Le versaillais Churchill aidé par Staline en Grèce.
- La libération de la France.
- Guerre sociale en Italie.
- Lutte armée, stalinisme, constituantes : Grèce, Italie et France.
- Belgique et Luxembourg.
- Libérations et secondes occupations dans les mémoires collectives.
- Apocalypse allemande.
- Derniers actes et vrai début de la guerre d’Algérie.
- Conclusion sur l’Europe.
- Quelques mots sur l’Asie.
Les trotskystes dans la guerre.
- Pour appréhender la question.
- En Europe continentale : le paradigme français. Sa documentation.
- Le paradigme français : de juin 40 à juin 41.
- Le paradigme français : après le tournant de juin 41.
- La formation du Secrétariat européen.
- Les cellules clandestines dans la Wehrmacht.
- Et la lutte armée ?
- En 1944.
- De sacrés militants …
- Le paradigme français : conclusion politique.
- Quelques mots sur le reste de l’Europe continentale : Grèce et Italie.
- Norvège, Allemagne, Autriche.
- Les guerres qui s’intégrèrent à la seconde guerre mondiale.
- Chen Duxiu et les trotskystes chinois.
- La question que nous pose Chen Duxiu : être pour la victoire des alliés. Evidemment !
- Le Socialist Workers Party des Etats-Unis pendant la seconde guerre mondiale : la PMP version Cannon.
- Le procès de Minneapolis.
- La tendance Goldman-Morrow (et Van).
- Natalia Sedova-Trotsky contre Cannon.
- L’extension de la lutte de tendances.
- Les trotskystes britanniques.
- Dans les armées du désert.
- Où Ted Grant se fait traiter de social-patriote et (à juste titre) le prend fort mal.
- Où survient un tandem …
- Quelle Internationale ?
- D’un secrétariat international … à un autre.
Suite de cette histoire, ou le refoulé qui fait coucou.
Considérations sur l’union sacrée, le défaitisme et le fétichisme de 14-18.
- Encore un coup d’œil sur juin 40 …
- La fétichisation d’août 14.
- A propos du « défaitisme révolutionnaire » de Lénine.
- A nouveau sur les différences de 39-45 par rapport à 14-18.
- L’ « internationalisme au-dessus de la mêlée » tend au final vers l’union sacrée.
Prendre parti dans les guerres.
- Avant le 24/02/2022.
- Depuis le 24/02/2022.
Tout à fait d’accord avec ces positions . Cela fait longtemps que j’essaie , souvent en vain , de faire connaitre , les positions du grand Léon Trotsky développées juste avant sa mort sur la deuxième guerre mondiale qui vient . Sa mort fut un désastre irréparable pour les militants , le trotskisme en général et partant pour le mouvement ouvrier international .
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Article intéressant que j’aimerais bien avoir en brochure. Comment contribuer à sa publication ?
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Premières réactions après un survol des titres et sous-titres, et la lecture de quelques passages qui ont retenu mon attention (le texte est long).
1) Cette réflexion est utile aujourd’hui face à la question de la défense de l’auto-détermination du peuple ukrainien.
2) Il manque un chapitre sur les discussions au sein du SWP et de la YSA des Etats-Unis de 1960 à 1974, face au gonflement énorme de l’armée américaine, à la guerre du Vietnam, au développement du mouvement des déserteurs (Canada, Suède), des réfractaires et insoumis, des demandeurs de réforme à titre médical, des collectifs de soldats contestataires, de la démoralisation de l’armée américaine au Vietnam, des sursis étudiants, de l’abolition du service militaire, de la féminisation de l’armée. Toute cette discussion s’est faite en référence à la « Proletarian military policy » de Trotsky et du SWP, dont la direction du SWP et de la YSA des années 1960 et 1970 disait qu’elle devait être adaptée aux nouvelles conditions. Le courant trotskyste « Ted Grantiste » («Militant »), très peu présent (voire absent) aux Etats-Unis n’a apporté aucune contribution à cette discussion états-unienne, qui mérite d’être étudiée dans le contexte de l’importance des courants pacifistes (« Make Love not War »), antimilitaristes, anarchisants et anti-conscription aux USA.
Il y a peut-être des parallèles à cette discussion dans les pays qui avaient des troupes alliées aux Etats-Unis présentes au Vietnam même (Australie, Nouvelle-Zélande, Corée du Sud). Ailleurs (Canada, Royaume Uni, Suède, France, Allemagne, Japon, etc) la question de l’accueil des déserteurs et réfractaires américains avait un poids particulier.
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Salut camarades,
Encore merci pour cette contribution fort intéressante. Je n’ai pour le moment encore lu que le quart du pdf, mais je me pose la question suivante : y a-t-il un faisceau d’organisations ouvrières assez conscient et puissant en Ukraine pour vouloir et pouvoir prendre le pouvoir et installer un gouvernement qui applique ne serait-ce qu’un début de programme en faveur des travailleurs? On voit où je veux en venir : si ce n’est pas le cas, les classes laborieuses ukrainiennes sont bel et bien engagées dans une guerre qui est certes une guerre de défense contre l’impérialisme russe, mais de défense de quoi? Des intérêts des oligarques ukrainiens? Je caricature à dessein pour qu’on puisse éclairer ma lanterne. Pour l’instant, sans remettre en cause les livraisons d’armes à l’Ukraine, je trouve les revendications territoriales qui vont au-delà du front actuel dangereuses pour la population ukrainienne et les populations voisines (#Saporischschja, #pluslaguerredureplusilyaurademorts)
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Ce qui est certain, c’est qu’une victoire de l’impérialisme russe aménera une situation de barbarie équivalente à ce qui prévaut aujourd’hui en Syrie, grace à l’appui indéfectible apporté par Poutine au clan El Assad. On pourra toujours discuter du sexe des anges et du poids des organisations ouvrières sous le régne de l’ordre noir cher aux fascistes eurasiens à la Douguine…. Et cela, le peuple ukrainien le sait. Pas besoin de lui faire la leçon.
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Quand l’Alsace-Lorraine a été annexée par les Prussiens après la guerre de 1870, il a été négocié que les Alsaciens et les Lorrains qui voudraient émigrer vers la France le pourraient – en abandonnant leurs biens. Ne serait-il pas plus pertinent de militer pour 1) qu’un traité de paix soit signé le plus rapidement possible pour mettre fin à la boucherie, avec par exemple fixation des frontières à peu près selon le tracé actuel du front, 2) l’accueil et l’intégration économique et sociale (avec dédommagement pour les biens perdus) en Ukraine et en Europe occidentale de tous les Ukrainiens des territoires occupés qui préfèrent quitter leurs terres plutôt que de vivre sous le régime de Poutine?
Avec un traité de paix négocié de la sorte, la situation ne serait pas comparable à celle de la Syrie : un Etat ukrainien souverain serait maintenu, et comme les Ukrainiens des territoires occupés désireux de le faire auraient la possibilité de quitter, dans de bonnes conditions, la zone administrée par Poutine, Poutine ne serait pas dans le besoin de faire régner une terreur plus grande et une répression plus forte en Ukraine annexée que ce qu’il fait en Russie.
Je maintiens les présupposés de ma position : 1) une guerre impérialiste, tant qu’elle est en cours, n’apporte rien au mouvement révolutionnaire, bien au contraire : elle draine l’énergie des masses vers le chauvinisme, et extermine massivement les populations en des temps records ; de plus, les capitalistes profitent du chaos pour accroître leurs pressions sur les travailleurs, « déréguler » le travail, 2) ce n’est qu’une fois une paix signée que les masses, armées, peuvent faire pression sur leurs gouvernements, voire prendre le pouvoir. Cf la révolution d’octobre, cf aussi la Commune, même si la principale erreur des communards, de mon point de vue, a été de vouloir poursuivre la guerre contre la Prusse plutôt que de se concentrer sur les Versaillais.
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Pour répondre au dernier message de Rémy Victor ci-dessus.
Tu nous proposes une « paix » entérinant l’occupation-annexion du tiers de l’Ukraine avec transfert de population ! En imaginant que ça, ça ne serait pas « la Syrie » et que « Poutine ne serait pas obligé » d’être méchant ! Et puis après, s’il y avait un truc genre Commune de Paris, ça serait sympa !
Que dire ? Tu pense sincèrement nous faire là une démonstration de réalisme ??? c’est surtout une démonstration du genre d’impasse burlesque (en imagination) et sanguinaire (en cas de mise en œuvre) auquel peut aboutir tout espèce de pseudo-neutralisme prétendant ou non s’autoriser de la lutte des classes …
Le plus remarquable étant la comparaison avec le « compromis » sur l’Alsace-Lorraine en 1871, censé éviter la poursuite de la guerre, si l’on comprend bien, malgré le fait que les communards ne l’avaient pas compris ainsi, nous dit-tu. Marx non plus : il avait tout de suite vu le risque d’une « guerre de races » entre latins et russes contre l’Allemagne, bref les grandes lignes de la mère de toutes les guerres impérialistes qui éclatera en 1914.
Dans ton génial scenario, elle éclaterait d’ailleurs beaucoup, beaucoup plus vite.
C’est un peu consternant, mais assez démonstratif …
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Je vais essayer de refaire la démonstration sans parallèle historique ni géographique, car ça nous entraîne dans des querelles d’interprétation dont on ne verra jamais le bout.
1) La première certitude que j’ai, c’est que si la guerre se poursuit, il va y avoir beaucoup plus de morts et de destructions que si elle s’arrête via la négociation d’un traité de paix entre l’Ukraine et de la Russie. À partir du moment où une paix sera signée, elle sera amenée à durer quel que soit le développement politique qui s’ensuivra dans chacun de ces deux pays. Si les oligarques restent aux manettes en Ukraine, ils vont continuer à renforcer massivement l’armée avec l’appui des puissances occidentales, qui ont là un magnifique débouché pour leurs industries. L’armée russe ayant déjà payé un très lourd tribut, et l’industrie russe ne pouvant concurrencer celles des pays occidentaux, le régime de Poutine n’aura aucun intérêt à déclencher un nouveau conflit armé une fois signée une paix lui permettant d’annexer une partie du territoire ukrainien.
2) Je ne crois pas qu’on puisse espérer que quelque chose de bon puisse sortir de la poursuite de la guerre (en dehors de profits juteux pour les industriels de l’armement). Je ne suis pas persuadé que le fouillis impressioniste de ce qui reste des organisations ouvrières ukrainiennes, où aucune organisation révolutionnaire ou à potentiel révolutionnaire ne semble poindre, soit en mesure de se retourner contre Selenski et l’oligarchie après avoir été sur une ligne franche d’union nationale. Mais si je me trompe sur ce point et qu’on peut me convaincre de mon erreur, je suis preneur.
3) Le mieux que nous pouvions faire dans ce contexte me semble donc être d’élaborer une position pour que cesse le plus rapidement possible les massacres de masse, et pour protéger la population de l’Ukraine occupée en aidant à la migration, en accordant l’asyle à ceux qui le voudront, et en les accueillant, les intégrant et les dédommageant au mieux. Il vaut mieux perdre des biens que perdre la vie, que perdre des proches.
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je ne rajouterai rien au texte, ni la bibliographie que je connais qu’à peine, ni aux commentaires des plus pointus, bref pourquoi ouvre-je ma tiote goule, bin juste pour dire bravo et pisse c’est tout, pour mi c’est déjà ça, au moins un « encouragement » dont vous vous foutez mais largué quand même en pôôôvre nano-micro soutien, bravo tertoustes,
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Ah, ah, ah. Le même Trotsky qui a mis en place et justifié la suppression de toutes les libertés civiles les plus élémentaires et la Terreur (sans même parler des droits des travailleurs avec sa militarisation du travail) qui glose sur la défense des libertés civiles américaines dans ses échanges avec Cannon.
On a beau être heureux de lire l’une des rares voix non Poutiniste à la « gauche de la gauche » on est bien obligés de se rendre compte que les trotskystes et autres marxistes révolutionnaires n’ont encore tiré aucune leçon de l’histoire et des recettes de la « planification centralisée de la production ».
Relire les textes d’Orwell pendant la guerre serait bien plus profitable que cette version hardcore et stratosphérique du défaitisme révolutionnaire.
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Ah ah ah, le même Trotsky qui dut combattre 14 armées étrangères sans même parler des Blancs à l’intérieur, après 4 ans de guerre mondiale, 3 ans de révolution et l’arriération économique du pays…. excusez du peu !
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Le chapitre français des MIA (Marxists Internet Archive – http://www.marxists.org ) vient de publier ce 3 novembre 2024 une traduction de l’éditorial de Juillet 1940 du bulletin Youth For Socialism, rédigé par Ted Grant relatif à la situation créée par l’effondrement de l’impérialisme français en juin 1940 et l’attente d’une invasion de la Grande Bretagne par les armées de Hitler.
Espérons que la lecture de cette archive amènera nombre de camarades se proclamant trotskystes mais n’ayant rien compris à la situation mondiale présente et encore moins à la PMP formulée par Trotsky dans les derniers trimestres de sa vie, à reconsidérer leur position au mieux abstentionniste, au pire campiste. Ceci vaut à commencer par les camarades se réclamant ou ayant été formés dans la tradition du courant de Ted Grant.
Ted Grant, Les travailleurs doivent être armés contre le capitalisme
Juillet 1940
Ces dernières années ont marqué la fin d’une époque de l’Histoire de l’Humanité. La défaite stupéfiante et paralysante des armées françaises face à la machine de guerre nazie a laissé le continent européen sous la tyrannie sanglante de l’impérialisme allemand.
Aux vaines vantardises de Reynaud ont succédé les capitulations honteuses de Pétain et Weygand. La réputation usurpée bâtie autour de la valeur militaire de ces « héros » a résisté à l’épreuve alors qu’elle ne concernait que la soumission des masses rebelles à la colonisation d’Algérie et du Maroc, mais qu’elle s’est révélée pitoyablement insuffisante face au monstrueux régime militaire allemand.
La classe dirigeante de France, qui avait contribué à l’arrivée au pouvoir de la réaction en Allemagne, s’est montrée totalement incapable d’opposer une résistance efficace aux légions nazies. Les capitalistes ont paralysé la lutte contre Hitler en tenant à l’écart les masses françaises. Hitler aurait pu être retenu dans le nord de la France, puis aux portes de Paris, si toute la population avait été mobilisée pour résister.
Pourquoi Paris n’a pas été défendu
Mais si les classes dirigeantes avaient armé les travailleurs, elles auraient couru le risque que ces armes soient utilisées non seulement contre Hitler, mais aussi contre elles-mêmes. Elles craignaient particulièrement les ouvriers révolutionnaires de Paris.
Une fois auparavant, alors que les Prussiens étaient aux portes de Paris en 1870 et que les ouvriers étaient armés, ceux-ci en prirent le contrôle lors du premier soulèvement ouvrier réussi de l’histoire. Le correspondant du Daily Telegraph en France écrivait le 17 juin : « Le danger d’un soulèvement communiste et d’une guerre civile a contraint le gouvernement français à demander la paix. » Ils remirent Paris intact aux Allemands.
La France a été trahie. La véritable Cinquième Colonne était le gouvernement de capitulation des financiers, des industriels, des millionnaires et des généraux. Ce sont eux qui ont remis le peuple français entre les mains d’Hitler. Plutôt que de perdre tous leurs profits par une victoire des masses françaises, ces « patriotes » préférèrent s’assurer de quelques miettes des tables nazies.
Comment la Grande-Bretagne sera-t-elle défendue ?
Et maintenant, les insatiables impérialistes allemands se préparent à la destruction de la Grande-Bretagne. Le gouvernement britannique a annoncé qu’il ferait tout pour contrer cette attaque à venir. Mais la classe dirigeante britannique est aussi pourrie que celle de France. Les seuls véritables préparatifs qu’ils font sont ceux destinés à être utilisés contre leur « ennemi principal » à l’intérieur du pays.
En France, 20 000 policiers ont été laissés à Paris pour « maintenir l’ordre » et en remettre le contrôle à Himmler. Une garde civile spéciale a été formée pour maintenir l’ordre à l’arrière des armées. Existe-t-il une garantie que la classe dirigeante britannique ne capitule pas de la même manière que celle de France ?
Il faut armer les travailleurs
Il n’y a qu’une seule garantie de réussite d’une résistance à une tentative d’invasion nazie : l’armement de la classe ouvrière dans chaque rue et dans chaque usine, et le contrôle de cette milice ouvrière par des comités ouvriers.
Cela rendrait la Grande-Bretagne complètement imprenable. Les masses sauraient se débarrasser des envahisseurs, parachutés ou acheminées par voie maritime.
Mais la classe dirigeante ne peut pas emprunter ce chemin pour la même raison que les dirigeants français ne pouvaient l’emprunter : cela représenterait une menace encore plus grande pour leur profit et leur domination que même une victoire nazie.
Chamberlain, le parti conservateur, les grandes entreprises et les banquiers de la City de Londres ont soutenu Hitler pendant des années comme rempart contre le socialisme, et ne l’ont combattu qu’à contrecœur lorsque l’impérialisme allemand menaçait leur empire et leurs profits. Les contradictions entre les deux impérialismes ne leur laissaient aucune alternative. Mais ils sont responsables de la situation désastreuse dans laquelle se trouvent aujourd’hui les travailleurs britanniques et européens. Ils constituent depuis des années la véritable cinquième colonne d’Hitler. Leur bilan, leur nature même et leur position dans la société les rendent complètement impuissants pour défendre les travailleurs contre le fascisme. Ils doivent être balayés et les travailleurs eux-mêmes doivent diriger leur propre destin.
Seul le socialisme peut vaincre Hitler
Depuis des années, les dirigeants travaillistes mènent campagne contre la politique profasciste de Chamberlain et du gouvernement. Mais ils siègent désormais dans ce même gouvernement et l’aident à mener une politique désastreuse pour la classe ouvrière.
Les syndicalistes, les militants du Labour et des ligues de la jeunesse doivent exiger que les dirigeants travaillistes engagent immédiatement la lutte pour le pouvoir. Les travaillistes doivent se munir d’un programme apte à mobiliser tous les travailleurs de Grande-Bretagne. Et ce programme doit d’abord préconiser d’armer les travailleurs contre l’ennemi capitaliste intérieur et contre l’envahisseur impérialiste.
Les ressources de la Grande-Bretagne ne pourront être utilisées que si un vaste plan est entrepris pour éliminer le gaspillage et l’inefficacité bureaucratique du capitalisme. La Cinquième Colonne capitaliste doit être rendue complètement impuissante par la prise de contrôle des banques, des mines, des terres, des chemins de fer et de toutes les grandes industries, sans indemnité et sous contrôle des travailleurs.
Grâce à un programme de socialisme intérieur, les masses britanniques pourraient être mobilisées dans la lutte à mort contre le nazisme. Mais nous devons affronter l’ennemi avec une bannière intacte. L’impérialisme britannique opprime les masses dans les colonies aussi brutalement qu’Hitler le fait contre les peuples qui sont sous ses ordres sur le continent. Les travaillistes doivent immédiatement publier une déclaration accordant la pleine autodétermination aux peuples de l’Empire.
On pourrait alors affronter les bombardiers et les chars d’Hitler sans craindre la défaite. Un appel pourrait être lancé à tous les peuples d’Europe, et notamment à celui d’Allemagne, pour qu’ils se rallient. Le soutien d’Hitler s’effondrerait alors sous ses pieds et un puissant mouvement de libération surgirait parmi les soldats et les ouvriers allemands.
Seuls le mot d’ordre d’une véritable libération sociale et nationale peut trouver un écho parmi les masses opprimées d’Europe. C’est seulement de cette voie que peut venir le salut de la classe ouvrière.
La perspective d’une armée britannique avançant vers la reconquête de l’Europe sous la domination des impérialistes après des mois et des années de préparation ouvre une perspective sans fin de massacres et de destructions.
Le choix qui s’offre à la classe ouvrière est clair. La voie de Blum et de Jouhaux a conduit à la dégradation et à l’humiliation des masses françaises, et à leur soumission à l’exploiteur nazi. Attlee et Citrine conduisent le mouvement travailliste britannique au même désastre. Seul un programme socialiste peut sauver les travailleurs de Grande-Bretagne et d’Europe.
Mais le temps presse ; il faut agir rapidement. Si les dirigeants travaillistes refusent de mettre en œuvre ce programme socialiste, ils seront alors vus par les masses comme des traîtres et il sera clair que seuls les socialistes révolutionnaires peuvent ouvrir la voie de la paix et du socialisme.
Source : https://www.marxists.org/francais/grant/works/1940/07/grant_19400700.html
Nota : l’original de ce texte est disponible dans l’archive consacrée à Ted Grant dans le chapitre en langue anglaise des MIA
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