Présentation
Nous avons reçu ce texte du camarade Pierre Saccoman qui présente des réflexions qui ne semblent pas être la seule propriété de leur auteur mais découlent des interrogations d’un groupe d’anciens.
La rédaction

Contribution

Quelques pistes de réflexions sur la situation actuelle, juste pour réfléchir au contexte, dans une perspective historique…En attendant mieux….

1)La question internationale :

Ce qui se passe aujourd’hui en Chine, au Kazakhstan, en Ukraine est grave. Est-on en face d’une guerre possible ? Comment définir l’évolution de la décomposition de l’URSS ? Tous ceux qui se sont battus pour la révolution mondiale à partir de la révolution de 1917 se sont-ils battus pour ce résultat ? Comment caractériser les rodomontades et les menaces de Poutine, comment caractériser les camps de rééducation en Chine, la répression des Ouigours, des Tibétains, la main mise sur Hong Kong etc.… ?

En peu de mots et malheureusement de façon succincte, il nous faut revenir aux conséquences de la guerre civile russe de 1918-1921 : les nécessités de la guerre, les destructions massives de forces productives, la lassitude de la classe ouvrière ont contraint le parti Bolchevik à se bureaucratiser de façon alarmante. Il s’est ainsi créée une couche sociale puissante, la bureaucratie, qui s’est doté d’un chef énergique, Staline et pour qui, désormais, le but n’était plus la révolution mondiale, mais la pérennité des privilèges acquis. En dépit des avertissements de Lénine, des actions de l’opposition de Gauche (Trotsky, Rakovsky…) cette bureaucratie a engagé un processus de destruction de toute démocratie au sein du Parti Bolchévik, de méfiance envers la révolution mondiale et est allé jusqu’à la liquidation physique de toute velléité révolutionnaire : trahison de la révolution allemande en 1923, de la révolution chinoise en 1926, de la révolution espagnole en 1936-37, alliance avec le nazisme pour partager la Pologne suivie de l’alliance avec les démocraties bourgeoises ensuite et qui entraîna la dissolution de la troisième internationale et l’inféodation des résistances ouvrières et paysannes aux bourgeoisies nationales. L’exemple français avec le « compromis » entre PCF et de Gaulle : des avancées revendicatives (sécurité sociale, statut du fonctionnaire, nationalisations…), contre la paix sociale ! Sans parler des procès de Moscou et des assassinats en masse dans les camps de la Kolyma entre autres…

Cette « couche » bureaucratique allait essayer de se transformer en classe possédante. Pendant longtemps, ni Staline, ni Khrouchtchev, ni Brejnev n’ont tenté de s’affronter à la classe ouvrière soviétique pour rétablir le capitalisme. Il a fallu la tentative d’ouverture de Gorbatchev et le coup d’état manqué de 1989 pour que Eltsine s’engage sur la liquidation de l’Union Soviétique et que le capitalisme se réintroduise en Russie et dans les pays du « glacis » soviétique. La suite, c’est la lutte entre l’ouverture complète au capitalisme, comme elle s’est réalisée dans les ex-pays d’Europe de l’Est, livrés à l’impérialisme américain et de l’Union Européenne ou la constitution d’un capitalisme russe, basé sur les oligarques issus de la bureaucratie stalinienne et financés sur la vente de gaz et de pétrole. Ce sera Poutine qui se fera le chantre de la solution « russe », le rappel de la « grandeur tsariste » avec le rétablissement de l’église orthodoxe en particulier…

Aujourd’hui, Poutine fait régner la violence et la terreur et joue sur les divisions-rivalités entre impérialisme US, impérialisme allemand ou français…Il veut reconstituer le marché « soviétique » au profit des oligarques de son entourage…D’où le problème ukrainien et l’intervention au Kazakhstan…(Tiens, on ne parle plus de la Biélorussie).

Il nous faut aussi étudier ce qui se passe dans les pays où formellement les régimes sont restés « communistes » : Chine, Cuba, Viet Nam, Corée du nord. Dans ces pays, la bureaucratie stalinienne est restée en place et elle ne cède pas encore totalement la place à un rétablissement complet du capitalisme, mème si leur économie est largement intégrée au marché mondial. Il faudra y revenir…

2) Autre question : celle de l’OTAN.

L’OTAN représente une machine de guerre contre les peuples. Tous ceux qui ont cru à la disparition de cette « alliance » après la disparition de l’URSS se sont trompés. L’OTAN n’était dans les années 50-60 dirigée contre le « bloc soviétique » qu’en apparence. L’étude de la situation intérieure italienne nous prouve que son rôle était surtout d’empêcher la révolution en Europe : les réseaux « glavio » en Italie et les manigances secrètes des services américains ont été très développés, alors que l’OTAN s’est bien gardé d’intervenir contre la bureaucratie en Hongrie en 56 ou en Tchécoslovaquie en 68…

Certes, la question est complexe : les pays de l’ex glacis soviétique considèrent aujourd’hui l’OTAN comme une garantie contre l’expansionnisme poutinien… Mais l’intérêt de tous les peuples européens est quand même la lutte pour la dissolution de l’OTAN et de la mainmise de l’impérialisme US….

3) La question française et les présidentielles :

Vaste programme comme disait le grand Charles…Le vrai problème , c’est qu’on est affronté à deux mouvements (reliés dialectiquement) : celui qui a abouti à la création des institutions de la Véme république, le « coup d’état permanent », la polarisation extrême des élections présidentielles, la « monarchie républicaine », le maintien formel de la république et de l’autoritarisme, un cadre particulièrement pesant pour les couches populaires et les travailleurs avec la remise en cause de tous les acquis sociaux, d’une part et d’autre part un mouvement de rejet populaire de la politique telle que l’a façonné la constitution de 1958 : la progression des abstentions, le ras le bol général, les gilets jaunes et tous ces mouvements qui se développent malgré les trahisons des appareils syndicaux et la disparition des partis de masse qui étaient censés défendre la classe ouvrière. Personne, dans ce qu’on appelle « la gauche » ne peut prétendre représenter les intérêts des plus précaires, des salariés, des laissez-pour compte. On a trop l’exemple de ce qui s’est passé en Amérique du sud, en Grèce, et même en France avec les « expériences » de Mitterrand, de Jospin, de Hollande. Mélenchon représente-t-il une solution ? Certains le pensent, d’autres ont des doutes. Mais le problème est : comment redonner la parole aux vrais producteurs, comment exproprier le capital dans un monde complètement soumis aux banques et aux possédants, avec les « règlements européens », les banques européennes, les banques mondiales etc.…N’est-il pas trop tard pour sauver la planète que le capital condamne à une mort écologique rapide ?

Aujourd’hui, vouloir regrouper les exploités, rouvrir des perspectives ne peut se réaliser que dans une lutte contre les institutions de la Vème République, contre les traités européens, contre la domination de l’impérialisme symbolisé dans l’OTAN, et en même temps chercher et trouver des solutions pour les masses dans les ex pays « soviétiques » qui se tournent vers des solutions nationalistes, voire fascistes, trouver des solutions pour les masses des pays musulmans qui se tournent vers l’islamisme le plus rétrograde en l’absence de réponses concrètes à leur misère etc.

Savoir tirer le bilan des trahisons du stalinisme, des leaders tiers-mondistes, réfléchir aussi à l’incapacité des avant-gardes trotskistes, 84 ans après la proclamation de la IVème internationale.

La solution est-elle électorale ? Mélenchon représente-t-il encore un espoir ? Faut-il trouver des moyens de regrouper les abstentionnistes dans un « boycott actif » ?

Lénine disait qu’il fallait toujours coller le plus possible aux aspirations profondes des masses exploitées, mais aussi et surtout faire un travail d’éducation pour que ces masses reprennent confiance dans leur propres forces et capacités de s’organiser…Ce qui rejoint le travail de Gramsci qui parlait de combat « culturel » …

Comment aborder ces problèmes ?

31 janvier 2022