Les manifestations du 26 mai se sont déroulées : elles sont certes importantes mais ce n’est pas la marée populaire annoncée. Elles n’entrainent pas, malgré les attaques de Macron, dont la dernière contre la jeunesse et les 400 000 qui ne trouveront pas de place à l’université, la majorité de la population laborieuse dans la rue. Sur quel mot d’ordre au juste ? Et pour aller où ?

La veille de la manifestation, les confédérations sortent d’une table ronde avec le ministère des transports, au terme de laquelle il est annoncé que le gouvernement reprendra une partie importante de la dette de la SNCF à hauteur de 35 milliards sur les 50. Et après ? Quid du statut des cheminots ? Précisons que les 35 milliards, quand on dit l’État, ce sont les contribuables qui paient une mauvaise politique de gestion du service public. Et si le gouvernement parvient à casser quand même le statut des cheminots, il confiera un bébé au privé qui pourra donner libre court à une libre concurrence européenne qui remplira la poche des actionnaires. Comme en Grande Bretagne et bonjour les dégâts ! Les syndicats « autonomes » CFDT et UNSA se félicitent de cette « avancée » ! Un pas de plus vers l’éclatement de l’Intersyndicale.

Les plus larges masses n’ont pas rejoint les manifestations en raison du fait que le mot d’ordre de la plupart des organisations qui y appellent, direction de la CGT en tête, ne remettent pas en cause la légitimité de Macron. La ligne c’est : il faut que Macron comprenne et entende la rue, qu’il arrête ses attaques. La plupart des organisations qui composaient le cortège parisien sont sur cette ligne, mais quand on discute avec les uns et les autres, avec les porteurs de pancartes de la FI ou du PCF, je m’en tiens à ceux-là avec qui j’ai pu discuter, c’est la question de chasser Macron et ses réformes qui vient très vite dans la discussion… Donc période incertaine d’incubation politique ! Le frein est donc à l’intérieur du mouvement. Ce qui à mon sens explique la sympathie certes à l’égard de l’initiative mais les réserves à descendre tous ensemble dans la rue.

Peut-on penser la situation française aujourd’hui sans intégrer ce qui vient de se passer en Italie ? le processus de destruction du vieux mouvement ouvrier a été plus largement avancé dans ce pays, où le PCI (Parti Communiste Italien) et sa ligne du compromis historique avec la Démocratie Chrétienne, cœur de l’État bourgeois depuis 1945, a conduit le mouvement communiste à sa propre liquidation dans le Parti Démocrate. Le développement de la crise a vu l’émergence du mouvement 5 étoiles de Pepe Grillo sur une ligne populiste : une partie significative d’électeurs de gauche ou ex-communistes sont aujourd’hui dans ce mouvement. Aujourd’hui on assiste à un rapprochement avec la Ligue du Nord, mouvement d’extrême droite. C’est un élément de plus, avec le brexit, qui conduit à l’éclatement de l’Union Européenne. Pour laisser la place à quoi ? La nébuleuse « gazeuse », ni gauche ni droite, pour reprendre le qualificatif de Mélenchon à propos de son mouvement FI, m’inquiète. On ne construit rien de bon en rompant avec le mouvement ouvrier. Cela rappelle de très mauvais souvenirs.

Après le 26 mai, et cette « déferlante » qui n’en fut pas une, la question des questions reste posée. Quelle alternative politique ? Peut-on attendre 2022 pour donner une réponse aux salariés, confrontés qu’ils vont être aux contre-réformes de Macron ? Je ne pose même pas la question des élections européennes de 2020, après l’affaire de l’Italie, à un parlement cache-sexe et le formidable taux d’abstentions qu’elle vont générer. Elles ne seront en aucune manière une embellie politique.

Ces quelques questions nous interpellent aux lendemains du 26 mai, nous qui voulons reconstruire une alternative politique.

C’est pourquoi je vous appelle à participer à la réunion que nous tiendrons le samedi 2 juin à Paris..

Source : http://socialisme-2010.fr/blog2016/mai2018.php#mai12