Non, l’état du pouvoir exécutif de Macron en France n’est pas du tout, mais alors pas du tout, reluisant. Alors même qu’il vient juste d’être réélu, et de former, au bout d’un certain temps voire d’un temps certain, son gouvernement. L’explosion des prix de l’alimentation et des carburants crée une situation d’urgence : il y aura une loi d’urgence, nous dit-il … après les législatives de juin, et qui ne concernera pas les salaires. Il s’occupera alors du report de notre départ en retraite, nous dit-il aussi. Le ministre partant de l’Éducation nationale a annoncé le retour des Maths dans l’enseignement commun en lycée, aveu implicite de la catastrophe qu’a été sa « réforme », mais à ce jour personne ne sait rien sur comment cela va se passer, et surtout pas son successeur ! Quant au principal ministre récemment issu de LR, il est accusé de viol et maintenu, comme tous ses collègues nantis de casseroles. Le seul domaine où Macron est censé agir, ce sont les gesticulations diplomatiques pour « rouvrir le dialogue » avec Poutine, sous l’œil à juste titre soupçonneux des ukrainiens …
Une chose est sûre : ce qui est normalement acquis sous la V° République depuis le passage au quinquennat présidentiel et la mise en place du calendrier plaçant les législatives après les présidentielles, à savoir un scrutin législatif à la botte du président, ne l’est pas. Ceci est en soi un premier coup démocratique porté à Macron. Quelle en est la raison ?
La raison n’en est pas la volonté de vaincre des dirigeants de la NUPES, PS/PCF/EELV/LFI, J.L. Mélenchon en tête. La NUPES n’est pas un déclencheur, c’est une réponse. Réponse à une situation dans laquelle si on est si peu reluisant « en haut », c’est parce qu’en bas on en a assez. Ce qui s’est manifesté par les 27,9% d’abstentions (par rapport aux inscrits) et les 22% de votes Mélenchon notamment (par rapport aux exprimés) le 10 avril dernier, ce qui se manifeste dans les grèves pour les salaires, et dans la situation de rupture qui existe dans toute l’ « outremer » et y compris en Corse. La NUPES répond à cette situation en offrant la perspective de garder Macron, avec ses prérogatives présidentielles, mais avec Mélenchon premier ministre. Sauf qu’il faudrait pour cela avoir une majorité absolue de députés, comme première condition !
Ce qu’indiquent les sondages, c’est une NUPES devançant ou au pire faisant jeu égal avec les voix macroniennes. Ce qui indique que s’il y a une dynamique, elle est loin d’entrainer la masse des prolétaires des campagnes, des banlieues et des villes ; et que même si elle était devant, elle serait loin derrière en nombre de députés, en raison du scrutin majoritaire uninominal à deux tours, parfaitement adapté à la V° République, parfois aggravé par le découpage des circonscriptions. La NUPES dénonce-t-elle un tel déni de démocratie ? Non, car ce serait remettre en cause ces institutions, alors que le but officiel est de cohabiter avec leur président, déclaré par J.L. Mélenchon légitime pour 5 ans. La NUPES veut-elle gagner ?
Partisans de la démocratie et des intérêts prolétariens, nous combattons pour la faire gagner, sans conditions ni illusions. Parce qu’une telle majorité poserait non pas la question d’une cohabitation pour garder Macron, mais d’une assemblée constituante, soit par l’assemblée se proclamant telle contre le président et le régime, soit en ouvrant un processus démocratique dans tout le pays. Le processus constituant contre la V° République, ce n’est pas le premier ministre, c’est le mouvement de celles et de ceux d’en bas élisant et mandatant leurs représentants. Construite par en haut avec des désignations réservées aux uns et aux autres, mais jamais aux assemblées primaires des électeurs, des citoyens, des travailleurs, la NUPES ne réunit pas les conditions de sa propre victoire, qui lui fait peur.
Se dessinent donc en réalité les conditions d’une assemblée sans majorité, ce qui éclaire par avance tant les lenteurs de l’exécutif macronien que les appels à la cohabitation, car il y aura alors des formes de « cohabitation » parlementaire, mais dans le cadre de la V République, à géométrie variable, contre l’urgence sociale, écologique et démocratique. Cela dit, une telle situation ne serait en rien une défaite du monde du travail et de la jeunesse. Si ces derniers ont encaissé une défaite, elle est dans le fait que le précédent quinquennat Macron soit allé à son terme. Mais le nouveau quinquennat commence difficilement car s’exerce la pression des combats menés durant ce quinquennat, dont les leçons n’ont pas encore été tirées dans l’action, loin s’en faut. C’est pour cela que l’intérêt du prolétariat, au moment présent, est d’imposer malgré elle une représentation parlementaire de la NUPES, la plus forte possible.
Parce que, plus que jamais après le précédent quinquennat, se pose la question de l’affrontement social général et central et de sa préparation.
Et parce que le changement de régime ne se fera pas à froid, ni par la faveur d’un président, mais passera par une assemblée constituante imposée par l’affrontement.
Telles sont les coordonnées générales des temps qui viennent. A nous de les préciser, en commençant par affaiblir le plus possible Macron et Le Pen les 12 et 19 juin !
La rédaction, le 29-05-2022.