Éditorial du 1er juillet 2018
La presse en cause : malgré le mondial de foot la popularité du président Macron ne cesse de chuter ! Le point qui fait mal est que ce qui, paraît-il, plaisait dans son style jeune et impérial, est devenu irritant voire insupportable. Qu’il se permette de tancer violemment un adolescent irrespectueux, au point de justifier pleinement, au fond cet irrespect, puis d’aller voir le pape et, entre deux propos outrancièrement anti-laïques, de sortir une vanne stupide sur les … Bretons, il baisse et baisse encore, et ce ne sont pas les vaisselles dispendieuses et autres piscines de Brégançon qui arrangent les choses. Et il y a pire : autour du financement de sa campagne de 2017 et de la formation de sa camarilla, un matelas d’ « affaires » dans la tradition de la V° République – la vieille V° République, pas celle qu’il voulait rénover – se met en place.
Tout cela traduit une réalité de fond, à savoir qu’il ne cesse de frapper la population et le salariat, mais qu’il n’a en rien, pour l’heure, gagné ni inversé en profondeur tous les rapports sociaux, ainsi qu’il prétend le faire.
Pour celles et ceux d’en bas, un mot résume toute sa politique, tout ce qu’il est : violence.
Violence de la baisse du niveau réel des salaires en pleine « reprise » conjoncturelle. Violence de la casse du code du travail et du statut de la fonction publique. Violence contre les vieux. Violence contre les jeunes avec notamment Parcoursup et le plan visant à enrégimenter pour le travail gratuit et le conditionnement idéologique, sous le nom de « service national universel ». Violence des projets de suppression des pensions de réversion. Etc…
Ainsi, les militants ouvriers ne doivent pas mépriser ou passer sous silence l’immense aversion que suscite la limitation de vitesse à 80 km à l’heure sur les routes secondaires. Oui, c’est là, et depuis quelques mois, la mesure de Macron qui suscite le plus de commentaires dans les villages. Parce que tout le monde comprend qu’au nom de la sécurité, ceci va permettre d’organiser des opérations policières d’extorsion fiscale massive ; que les conducteurs réellement dangereux, qui dépassent largement les 90, ne vont pas pour autant être stoppés ; et que ceci accompagne la baisse des budgets aux collectivités locales et à l’entretien des routes. Plus fondamentalement encore, la question de la « sécurité routière » mériterait une analyse poussée et un combat politique sur le terrain, car elle cristallise les rapports entre les individus et l’État : faire de cette question une affaire de culpabilité individuelle alors que les flux tendus, l’industrie automobile et pétrolière, la pression du travail, engendrent massivement cette mortalité que l’on rejette sur « les gens », est caractéristique. On nous abreuve de spots culpabilisants sans jamais interroger le trafic de poids-lourds ni se demander combien d’accidents pourraient être des suicides. En fait, c’est tout l’odieux des rapports sociaux dominants et de l’État qui les garantit qui se cache sous cette question. Que « le peuple » grogne sur les 80 km/h est lourd de contenu.
Dans la violence de Macron, il est également essentiel de comprendre la violence contre ceux que l’on appelle les migrants et qui sont des réfugiés. Le récent sommet européen a consacré la faiblesse diplomatique française mais aussi son alignement de fond sur le même principe qu’Orban, Kurz ou Salvini : des personnes qui ont pris la fuite au risque de leur vie à travers la Méditerranée doivent d’abord être parquées pour faire le tri entre la minorité acceptable relevant du droit d’asile et la majorité à renvoyer d’où elle a fuit ! La divergence porte sur la localisation des « lieux d’accueil », c’est-à-dire des centre d’enfermement. En attendant, il y a accord pour interdire aux ONG d’agir au large de la Libye et confier aux bandes armées esclavagistes libyennes le soin de « gérer les flux ». Sous les mots onctueux de la diplomatie, nous sommes dans le crapuleux haut-de-gamme. Or, cette violence dirigée contre une partie de la population, vise au final à taper sur tout le prolétariat, toute la jeunesse. C’est pourquoi les discours sur la nécessité de frontières fermées et d’une régulation participent de la même violence. Eux aussi ne peuvent que se retourner, à supposer que telle ne serait pas leur intention initiale, contre tous les exploités, tout en cherchant à les diviser.
Le sentiment de la violence du pouvoir, de Macron, doit être caractérisé plus précisément dans son contenu politique : il aboutit à contredire la légitimité du président et du régime. Par conséquent, pour ces raisons politiques, la question politique de l’heure ne devrait pas être l’unité (ou pas) dans les élections européennes, mais l’unité dans et pour l’affrontement social dans l’année en cours, unité qui devrait à son tour conditionner les sujets électoraux.
La rédaction.