Maria Aliyeva est morte. Cette ouvrière, née en 1952, avait, en mars 1991, harangué ses camarades de l’usine électrique de Minsk, qui avaient voté la grève, et elle avait conduit la marche de plusieurs milliers de travailleurs vers le centre de Minsk, place Lénine. Ce fut un moment clef de l’affrontement entre la classe ouvrière dans toute l’URSS et l’État dont beaucoup de bureaucrates devenaient des capitalistes individuels, liés par des liens mafieux.

Maria Aliyeva était une figure de la conscience nationale bélarusse. Elle était bien sûr de tous les combats depuis août 2020 et elle y a sans doute épuisé ce qui lui restait de santé. Dans un entretien publié fin septembre elle dénonçait le système mafieux de Loukatchenko pour qui il y a « les siens » et les autres, la grande majorité. Elle était une figure emblématique des marches des retraités qui ont lieu tous les lundis. Elle se réclamait politiquement du Parti social-démocrate bélarusse Hramada.

Dans un message en bélarusse sur les réseaux sociaux, le président du syndicat indépendant BKDP Alexandre Iarashuk lui rend le plus beau des hommages en permettant de comprendre la place historique d’une telle figure : elle fut à la classe ouvrière et aux femmes bélarusses ce qu’Anna Walentinovic fut pour la Pologne. Rappelons qu’Anna Walentinovic a lancé la grève des chantiers navals à Gdansk en août 1980 et l’a relancé par « solidarité » (Solidarnosc) quand Walesa allait l’arrêter. Anna Walentinovic est morte dans le crash de l’avion présidentiel polonais en 2010, moment clef de la crise nationale polonaise actuelle.

Non loin des fosses de Katyn et des plaines boisées où vivait Maria Aliyeva, laquelle meurt aussi au moment précis où, à coté de la longue « grève générale » bélarusse, les femmes en Pologne écrivent elles aussi une nouvelle page de l’histoire du combat pour l’émancipation humaine.

25-11-2020