Nous ne sommes pas acharnés à signaler et commémorer les anniversaires, à Aplutsoc. Nous essayons de le faire lorsque cela a vraiment un sens pour le moment, ou pour le temps, présent.

Le 17 décembre 2010 Mohamed Bouazizi, jeune tunisien diplômé de 27 ans, s’immolait par le feu devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid après que la police lui ait confisqué sa charrette et sa balance et l’ait frappé et humilié, lui qui faisait survivre ses parents et sa famille par son petit commerce ambulant de fruits et légumes. Son geste symbolisait le refus populaire de la hogra, cette infamie de la police voleuse, violente et violeuse, et l’exigence de dignité du peuple. Sa mort le 4 janvier, après une visite hypocrite du président-dictateur Ben Ali, donnait le signal spontané de la grève générale et de la révolution, qui chassèrent Ben Ali 10 jours plus tard, et qui atteignaient l’Egypte, le Yémen, la Libye, le Bahrein et la Syrie dans les deux mois qui suivirent.

Le suicide par le feu de Jan Palach en 1969 avait marqué (nous le savons maintenant) le signal de la fin des espoirs de révolutions à l’Est et à l’Ouest, au Nord et au Sud, de 68. Le suicide par le feu de Mohamed Bouazizi fin 2010 a lancé une nouvelle époque révolutionnaire. Ce jour là, notre XXI° siècle a commencé.

Il n’avait en effet pas commencé, comme l’avaient dit bien des journalistes, le 11 septembre 2001 quand des crimes islamistes de masse lançaient l’impérialisme nord-américain dans une éruption mondiale, ni le 15 septembre 2008 quand la faillite de Lehman Brothers actualisait la crise aigüe et chronique du capitalisme et sanctionnait l’échec de l’éruption mondiale des États-Unis. Par eux-mêmes, ces grands évènements, heurtant des secteurs du capital mondial (Al-Qaïda comprise), portaient la guerre et la crise. La réponse, la révolution, devait venir d’en bas. Bien sûr, elle affleurait, de Téhéran à La Paz. Mais c’est la mort choisie et atroce du petit vendeur ambulant Mohamed Bouazizi, dans le pauvre Sud tunisien, qui l’a mise à l’ordre-du-jour, par une mort qui fut un cri de vie et de volonté pour des millions et des millions d’exploité(e)s et d’opprimé(e)s.

« Révolutions arabes », Marikana, Maidan, puis #MeeToo, Gilets jaunes, mondialisation des insurrections depuis fin 2019, Black Lives Matter, grève générale bélarusse … , et maintenant Bharat Ban, Chalo Delhi, Bharat Chohodo : grève générale, montons à Delhi, quitte l’Inde (ceci s’adresse à Modi !) : voila le flot qui a été ouvert, à l’échelle mondiale, symboliquement et, de fait, réellement, par le suicide du jeune vendeur ! Et c’est le début !

Ce siècle a 10 ans, avec Mohamed Bouazizi, avec les milliards de prolétaires qui sont l’humanité, et qui conjureront le fer, l’acier, le sang et le CO2 du capital, pour réaliser la paix, le véritable socialisme et la planète des vivants.