Il semble que l’armée azerbaïdjanaise a attaqué ce matin 27 septembre l’ensemble de la frontière arménienne et bombardé des villages au Karabagh ainsi que la ville de Stepanakert. La présidence arménienne affirme que la guerre a commencé. Il est question de centaines de morts civils et militaires.
Le Karabagh, dans toute l’histoire de l’URSS et particulièrement en 1988-1992, a été le foyer central du mouvement national arménien, les Arméniens y étant majoritaires.
Les aspirations démocratiques tant arméniennes qu’azerbaïdjanaises (à domination azérie, mais les Azéris, anciennement appelés Tatars, sont loin d’être le seul groupe national ce cet État et sont en outre largement présents en Iran) de la période autour de 89-91, ont été ensuite trahies et bridées :
- par des présidences corrompues en Arménie,
- par la dictature de l’ancien chef du KGB et dirigeant du PCUS Aliev, dont le fils est l’actuel président azerbaïdjanais, à la tête d’une bande de richards du pétrole.
La pression contre le Karabagh, qui s’exerce sur les frontières Est mais aussi Sud et Ouest du Karabagh et du reste de l’Arménie (depuis le Nakhitchevan, enclave azerbaïdjanaise protégée par la Turquie et frontalière de l’Iran, créée par les Britanniques en 1919 et confirmée par Staline en 1921), a été le moyen d’aligner l’Arménie, par peur des « Turcs » (ceux de Turquie, avec le souvenir du génocide de 1915-1919, et les Tatars-Azéris) sur Moscou, d’où son adhésion à l’Union eurasienne à l’été 2013, quelques mois avant que n’éclate la crise ukrainienne.
Depuis, une révolution avec grève générale et vaste mouvement national anti-corruption a porté au pouvoir en Arménie comme premier ministre, et dans le cadre d’un compromis avec l’ancien pouvoir et avec Moscou, Nikol Pachinian. Une nouvelle guerre nationale le confronterait à une situation nouvelle et grave, mettant en jeu les compromis passés.
Le risque de guerre revêt un caractère national et défensif coté arménien, mais il provient des manœuvres du « grand jeu » entre pouvoir turc et pouvoir russe, qui « jouent » aussi en Libye, en mer Égée, et en Syrie. Ce risque d’extension impérialiste de la guerre est donc tout à fait réel, par des interventions des puissances régionales et mondiales.
L’opposition en Azerbaïdjan et les mouvements sociaux en Russie, stimulés par la crise révolutionnaire bélarusse, ont un grand rôle à jouer pour éviter une nouvelle guerre et permettre à la fois le renversement du pouvoir d’Aliev et une réelle souveraineté arménienne.
SIGE_karabakh *** Local Caption *** CARTE LOCALISATION | OUEST FRANCE
Voici les 7 principaux points à connaître sur #Karabakh #Azerbaïdjan
1. Le Haut-Karabakh n’est pas un territoire contesté, c’est un territoire occupé et ce, depuis 1988! Cessez-le-feu en vigueur depuis 1994.
Le Haut-Karabakh, c’est le territoire de l’Azerbaïdjan. À la fois historiquement et officiellement reconnu par le monde entier, y compris l’Arménie.
2. A noter le rôle trouble de la Russie.
L’Arménie, qui à la soutien de la Russie a occupé non seulement le Haut-Karabakh, mais également 7 régions azerbaïdjanaises qui l’entourent, auxquelles l’Arménie n’allait pas abandonner pacifiquement toutes ces années.
L’Arménie a occupé le Haut-Karabakh et sept provinces voisines, entre 1991 et 1993. Le cessez-le-feu conclu en 1994 a été violé nombreuses fois.
3. La guerre n’est pas sur le territoire de l’Arménie.
L’armée azerbaïdjanaise n’essaie pas de s’emparer du territoire arménien ou d’une partie de celui-ci.
La guerre qui a commencé avec l’occupation des territoires de l’Azerbaïdjan il y a plus de 30 ans et à la suite de laquelle jusqu’à 20% du territoire de l’Azerbaïdjan a été occupé, est la guerre libératrice pour récupérer les terres en Azerbaïdjan.
L’Arménie a occupé 20 pour cent du territoire azerbaïdjanais et a mené un nettoyage ethnique contre les Azerbaïdjanais civils sur les terres occupées, ainsi qu’elle a commis le génocide de Khodjaly.
4. L’Azerbaïdjan pourrait libérer ses territoires il y a 30 ans.
Pourrait aussi le faire au cours des 30 dernières années.
Notre pays a une supériorité numérique de l’armée, une supériorité numérique et qualitative des équipements et des armes militaires.
Et si vous demandez pourquoi cela n’a pas été fait auparavant, la réponse est qu’à la suite du cessez-le-feu de mai 1994, les parties se sont engagées à résoudre le conflit pacifiquement et à le faire avec l’aide de médiateurs – le Groupe de Minsk de l’OSCE.
Malheureusement, pendant toutes ces années, Erevan officiel n’a pas montré la volonté politique pour la libération pacifique d’au moins 1 cm2 de la terre occupée.
Cependant, Erevan officiel devrait montrer une volonté consciente et lucide aux négociations sur le règlement de la question du Haut Karabakh et appliquer pour la solution graduelle du conflit les quatre résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU.
C’est le seul moyen de restaurer la paix et la stabilité dans la région.
5. L’Azerbaïdjan a répété à maintes reprises que nous étions partisans d’une solution pacifique du conflit et que nous voulions éviter à tout prix que n’éclate une guerre régionale.
Cependant, avec Nikol Pashinyan / Նիկոլ Փաշինյան, le processus de négociation s’est complètement gelé, ses déclarations contredisaient le règlement pacifique du conflit, et le bombardement croissant de civils vivant en première ligne n’a fait que faire passer le conflit de partiellement gelé à non gelé.
La dernière goutte dans le vase de patience de Bakou officiel a été le bombardement de civils en Azerbaïdjan dans la zone de première ligne le 27 septembre 2020.
6. Haut Karabakh : La mèche lente de Vladimir Poutine
Le problème du Haut Karabagh s’inscrit dans la catégorie des conflits territoriaux hérités de l’effondrement de l’Union soviétique, comme on en a vu d’autres en Ossétie, en Abkhazie, et de manière plus récente et spectaculaire avec l’invasion et l’annexion de la Crimée par la Russie.
L’éclatement du conflit au Sud-Caucase est un moyen pour la Russie d’infliger une humiliation stratégique à la Turquie et l’OTAN : il suffit de permettre au conflit de s’envenimer suffisamment, au point de faire peser un péril direct sur l’Arménie, pour justifier devant la communauté internationale une intervention russe conforme aux dispositions de l’OTSC.
7. L’OTAN ou l’OTSC?
Comme beaucoup de petits pays, Arménie et Azerbaïdjan sont étroitement liés à de plus gros.
En l’occurrence, l’Arménie est alliée traditionnelle de la Russie, au côté de laquelle elle appartient à l’OTSC, l’Organisation du Traité de Sécurité Collective, sorte d’OTAN russe réunissant en outre la Biélorussie, le Kazakhstan, le Tadjikistan et le Kirghizistan.
Azerbaïdjan, de son côté, est l’allié de la Turquie et partenaire stratégique de l’OTAN dans le Caucase du sud.
Assurer l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan signifie la victoire de l’OTAN sur la Russie dans le Caucase du Sud.
J’aimeJ’aime
Message intéressant, qui reprend les positions officielles du pouvoir azerbaïdjanais tout en les complétant par un appel ouvert à l’OTAN contre la Russie, présentant donc la Turquie comme membre de l’OTAN sans les graves contradictions qui l’ont opposée aux Etats-Unis et à la France depuis 2015. Nous reviendrons sur ces questions dans le cadre d’un prochain article plus développé sur le Caucase.
J’aimeJ’aime