Sébastien Lecornu est ministre des Armées (ce qui s’appelait voici peu ministre de la Défense ; le changement de nom peut avoir du sens) dans les gouvernements Macron/Borne, Macron/Attal, et à présent Macron/Barnier. Un livre vient de paraître sous sa signature, dont le titre est : Vers la guerre ?
Que le ministre des Armées du gouvernement français publie un livre sous un tel titre devrait être tenu pour un évènement en soi. Il y a, certes, un point d’interrogation dans ce titre. Mais le contenu du livre ne dément nulle part l’idée que le monde, l’Europe et la France sont en marche vers « la » guerre. Il est affirmé que « nous ne sommes plus en paix », et donc, en ce sens, nous sommes déjà en guerre. Et, bien que l’auteur, soucieux de relativiser l’impact ukrainien, ne le dise jamais explicitement, il est évidemment facile de dire depuis quand exactement : depuis le 24 février 2022, vers 5 heures du matin, heure française.
Du point de vue tant théorique que pratique et prospectif, « la guerre » est une catégorie qui se présente ici sous trois formes : la guerre nucléaire qui est censée être évitable parce que la France est « dotée », c’est-à-dire capable de la faire ; la guerre dite conventionnelle (mais ce terme ne doit pas être perçu comme voulant dire « traditionnelle ») que l’on a en Ukraine et dont le ministre des Armées estime que nous devons l’assumer, mais qu’il est improbable qu’elle concerne le territoire français ; et la guerre dite hybride (désinformation, renseignement, sabotages, cyber-attaques, actions sur l’économie et les crises sociales …) dans laquelle nous sommes déjà, et complétement.
Les « ennemis » sont à nouveau étatiques et le premier est la Russie – c’est là le point décisif même si, là encore, l’auteur évite de l’expliciter directement -, avec, d’autre part, une inquiétude sur la Chine qui n’est toutefois pas perçue comme adversaire militaire direct (ce qu’elle est pour les Etats-Unis), et, en outre – et c’est là sans doute la motivation réelle de ce livre – la conviction que les Etats-Unis vont « nous lâcher », liée, lors de la parution, au risque (réalisé depuis) de l’élection de Donald Trump, mais pas seulement : avec forces citations du « Général » (De Gaulle), l’affirmation selon laquelle les Etats-Unis ne prendront aucun risque existentiel pour l’Europe est au fondement de l’orientation développée ici, liée à la volonté d’autonomie stratégique de la France en tant que puissance, c’est-à-dire de l’impérialisme français.
Les autres ennemis étatiques explicitement désignés, en relation avec la Russie, sont l’Iran et la Corée du Nord, et l’ennemi non étatique qu’est le terrorisme islamique est rappelé, comme étant toujours présent (et justifiant d’ailleurs que les services français communiquent du renseignement même à la Russie !).
Enfin, un ennemi étatique, mais agissant entièrement de manière « hybride » contre la France, est désigné : il s’agit de l’Azerbaïdjan, qui riposte à l’aide militaire française croissante envers l’Arménie, laquelle a un pied hors de l’OTSC depuis début 2024 (Lecornu la présente comme effectivement sortie, mais en fait ce n’est pas si simple), en tentant de manipuler les mouvements anticoloniaux dans l’outremer français (S. Lecornu ne les caractérise évidemment pas comme anticoloniaux).
Donc, la position gouvernementale française est que la guerre non déclarée (mais ça ne se fait plus, les déclarations de guerre, et depuis longtemps !) avec la Russie a commencé et que les Etats-Unis vont nous lâcher. La France doit donc aller vers la guerre et elle doit faire pour cela un gros effort, sachant que sur un point stratégique elle hérite d’un gros avantage : la « dissuasion ».
Il n’est pas étonnant qu’un ministre des Armées de la V° République n’envisage aucunement et n’amorce aucune réflexion sur la perspective d’un monde sans armes nucléaires, et sans armes de destruction massive, perspective totalement exclue et interdite pour lui, et qui, disons-le, doit être affirmée comme un objectif révolutionnaire, de type « transitoire », car il faudra renverser l’ordre mondial capitaliste-impérialiste pour se débarrasser des armes de destruction massive. Non seulement de telles perspectives sont étrangères et contraires aux conceptions officielles développées ici, mais S. Lecornu prend bien soin de déniaiser, en la rejetant, la formule selon laquelle le nucléaire est fait pour qu’on ne s’en serve pas : pour qu’il « dissuade », il faut qu’on soit prêt à s’en servir bel et bien. C’est dit …
Le plus intéressant est le lien structurel, à la fois très concret et symbolique, qu’il établit entre l’arme nucléaire et la fonction présidentielle dans la V° République. Très clairement, l’un ne va pas sans l’autre. Le président est le monsieur qui peut appuyer sur le bouton et il est le chef des armées et le seul. Le gouvernement dirige la politique de défense et le parlement vote ses budgets, mais ces rôles sont, au fond, au service du pouvoir présidentiel-nucléaire. S. Lecornu développe toute une argumentation, qui me semble juste si l’on se place du point de vue constitutionnaliste de la V° République, en faveur de l’interprétation gaullienne du domaine réservé-partagé – en fait partagé mais sous la direction suprême du président, décideur ultime. Cette argumentation est immédiatement motivée par une défense des prérogatives de Macron contre les déclarations de Marine Le Pen faites cet été en envisageant une cohabitation avec lui. Mais elle vaudrait tout autant en faveur d’une présidente ou d’un président RN …
Ceci posé, l’essentiel du livre est un plaidoyer pour un effort massif d’investissement budgétaire qui correspond à la loi de programmation militaire couvrant la période 2024-2030. Implicitement, mais c’est transparent, les gouvernements ayant précédé ceux de Macron, Sarkozy inclus, et Hollande faisant la transition, sont jugés sévèrement pour avoir réduit les budgets et affaibli l’armée. La RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) sous Sarkozy, ce « traumatisme », est en fait dénoncée, même si Lecornu dit vouloir garder comme acquis les éléments de mutualisation et de coopération inter-armes censés en être issus. C’est donc une forte hausse des moyens qui est jugée nécessaire, pour pouvoir, en dehors du nucléaire, faire « la guerre » à l’horizon 2030, en encore, pas sûr que la France y parvienne, alors qu’elle est le seul Etat européen à avoir autant de moyens pour ce faire (même le Royaume-Uni, engagé dans un rattrapage similaire et même plus aigu, s’était, selon Lecornu, plus dépourvu qu’elle).
L’élément principal de la réparation/transformation porte sur l’armée dite de terre, et le choix politique peut être résumé ainsi : fini les Opex (opérations extérieures, surtout en Afrique, qui se sont mal terminées bien que Lecornu dise estimer que le Sahel et l’Afghanistan auraient en somme maintenu en forme l’outil militaire français), préparation aux combats continentaux de haute intensité : si ce n’est pas la guerre en Europe, on ne voit pas de quoi il peut s’agir.
Cela sous les trois formes du contact direct, des actions en profondeur et des actions en zone arrière. Pour ce faire, il faut des corps d’armées plus massifs, non plus des régiments de 1000 hommes mais des brigades de 8000. Le tout avec un remplacement du matériel : des VAB aux VBMR et des AMX-10 RB aux EBRC Jaguar en matière de véhicules blindés, plus des véhicules légers dits Serval, et, au-delà, l’ambition d’un couplage homme/machine et véhicules blindés/drones, avec la programmation d’armes se substituant aux combattants. Cette informatisation/automatisation est plus avancée dans la marine et l’aviation où l’auteur-ministre parle de couplage machine/machine, plus souvent encore qu’homme/machine.
Il y a bien sûr un non-dit béant dans ce livre, c’est le peu qu’il dit des interventions françaises en Afrique, ne signalant même pas, alors qu’il prétend à plusieurs reprises rendre hommage à « nos combattants », la présence maintenue de forces françaises au Tchad, au Gabon, au Sénégal et en Côte-d’Ivoire, et ne tirant aucun bilan du fiasco et de la gabegie des opérations prolongées successives Serval et Barkhane et du boulevard qu’elles ont ouvert à une ingérence russe qui, elle aussi, n’est pratiquement pas mentionnée, l’ennemi russe étant perçu comme européen avant tout (c’est, de fait, surtout l’influence chinoise en Afrique qui est, au passage, signalée). Il y aurait donc bien réduction de la voilure militaire en Afrique, qualitative et quantitative, à l’exception de Djibouti qui n’est pas tournée vers l’intérieur du continent, mais ce sujet n’est pas abordé.
Même aveuglement volontaire en ce qui concerne l’« outremer » colonial pourtant en crise, et réaffirmation de la volonté française de se manifester dans la zone indopacifique. S. Lecornu juge au passage ridicule l’immixtion azerbaidjanaise dans « nos » outremers. Le ridicule n’est-il pas plutôt celui d’une puissance impérialiste française qui par son autoritarisme et ses impérities ouvre des brèches, voire des boulevards, à l’inattendu Azerbaïdjan ?
Il y a en fait tentative de révision du paradigme impérialiste français, tentant de faire passer ses méthodes dominantes de la présence directe et de la tutelle maintenue façon Françafrique, dont l’effondrement en cours laisse une table rase servant de champ de rivalité à tous les impérialismes tant que les peuples n’ont pas pris le pouvoir, à la « puissance » reposant sur l’économie et le soft power. Rien n’indique que cette mutation faisant suite à la réduction forcée de la voilure en Afrique puisse être « gagnante ». Mais attention, sa dimension militaire reste centrale. Ici se place la catégorie la plus décisive des conceptions officielles développées dans ce petit livre : « L’exportation, condition sine qua non de l’équilibre de notre modèle et de son autonomie. » (titre du chapitre 10).
C’est, avec le nucléaire, l’autre héritage gaullien : les ventes d’armes. Nous avons une véritable doctrine censée articuler « autonomie stratégique » et commerce et liant les deux. L’industrie de défense voulue par De Gaulle et Pierre Messmer (le superviseur du génocide des Bamilékés au Cameroun en 1959, auquel Lecornu voue une grande admiration) est surdimensionnée – volontairement surdimensionnée – par rapport à nos seules armées, et ce serait une excellente chose. La clef, chez Lecornu est ainsi résumée : « … les seules commandes des armées françaises ne permettent pas d’atteindre des volumes suffisants pour produire des systèmes d’armes à des prix compétitifs et pour faire tourner les chaines d’assemblage sans discontinuité. »
Il est frappant de voir ici les impératifs d’accumulation, de circulation et d’accélération de cette circulation, du capital, s’imposer comme condition sine qua non de la production d’armements. La production doit tourner sans interruption, à flux tendus ; il doit donc y avoir flux continu d’exportations ; et les exigences de ce flux garantissent la qualité technique des produits (des armes), y compris pour l’armée française.
Du coup, selon Lecornu, « sans exportations, ce n’est pas 414 milliards d’euro dont nous aurions eu besoin pour notre programmation militaire, mais plutôt 500 milliards », à savoir que les bénéfices du complexe militaro-industriel français (Airbus, ArianeGroup, Arquus, Dassault Aviation, MBDA, Naval Group, KNDS France, Safran, Thalès) aident à la production d’armes pour les troupes françaises, mais aussi que les flux tendus à l’export sont censés assurer leur technicité.
Enfin, la boucle est bouclée en ce que les ventes d’armes conduisent et correspondent à des « partenariats stratégiques » qui tissent un système d’alliances et d’influence, avec, en fait, une remarquable collection de dictateurs que Lecornu est heureux et fier de fréquenter, en Arabie saoudite, Emirats, Qatar, notamment.
Ainsi, le secteur imbriqué entre Etat, finance, industrie, dit de la défense, se retrouve à la fois au cœur de la réalisation des derniers grands profits industriels du capitalisme français, et au fondement de la puissance militaire française ; autant dire que ce qui demeure d’un impérialisme français se concentre ici – voir à ce sujet les travaux de Claude Serfati.
Une forte contradiction géopolitique qui en résulte est que sur le terrain européen, le vrai rival impérialiste devient … les Etats-Unis, car ce sont eux les fournisseurs principaux des autres armées européennes. D’où l’éloge par Lecornu des ventes d’armes à la Grèce, la Croatie, et tout dernièrement des Rafales à la Serbie, par ailleurs allié de la Russie !
Autre contradiction : la disproportion entre ce rare secteur puissamment productif (avec l’agriculture) du capitalisme français et l’ensemble des branches économiques peut produire des quasi-pénuries ou des manques, en matière notamment de munitions et de poudres (problème que Lecornu explique par des erreurs de management mais qui renvoie en fait à ces causes structurelles).
En résumé, bien qu’il affirme comme objectif central une refonte des troupes dites terrestres en unités de 8000 hommes, la ligne générale de l’exécutif français réaffirmée là est fort traditionnelle et ne s’en cache d’ailleurs pas : arme nucléaire et exportations d’armes sont les deux piliers militaro-économiques de la puissance impérialiste française (et doivent préserver, peut-on ajouter, le troisième pilier constitué par le deuxième plus grand ensemble de Zones Economiques Exclusives maritimes du monde, après les Etats-Unis). Dans ce cadre, est réaffirmée la validité du choix, amorcé en fait dès Messmer et réalisé par Chirac, de la fin du service militaire : techniquement, il n’y a aucun besoin de masses humaines militarisées, lesquelles risquent même d’être encombrantes, voire dangereuses.
Reste le problème du « lien armée-nation » avec une armée de métier. L’impasse est ici totale pour Lecornu, et avec lui pour Macron et les autres principaux représentants politiques du capital en France. Il faut amener la nation à aimer son armée, mais celle-ci ne doit pas être appelée pour des missions diverses telles qu’éduquer les jeunes ou ramasser les déchets, sous peine de se déclasser et se dégrader, donc il faut lever le drapeau au début des journées d’appel, et le SNU (qui va sans doute se prendre, et c’est tant lieux, un coup de rabot budgétaire !), dont la vocation n’est nullement militaire, doit quand même servir à recruter un peu …
L’armée de Lecornu étant une armée impérialiste, il lui est évidemment impossible d’être démocratiquement liée à la population. Mais la guerre est réellement devant nous, et se présente pour les larges masses comme la nécessité de sauver l’existence de nations menacées de destruction – avant tout, au moment présent, les nations ukrainienne et palestinienne. Nous aspirons à la paix de même que nous aspirons à l’émancipation humaine, mais cela passe par une lutte, une guerre, que nous n’avons pas choisie. La dimension technologique et donc professionnelle de la chose militaire est incontournable, donc le fait qu’il doit y avoir métier des armes, et pas seulement milice populaire. Comment concilier cela avec l’aspiration démocratique à l’armement des travailleurs, des opprimés, des peuples ?
L’Ukraine nous montre les premiers éléments, à vrai dire massifs, de réponse. Et bien entendu, il n’y a rien là-dessus chez Lecornu : c’est normal ! L’échec de l’invasion russe de l’Ukraine en février-mars 2022 l’interroge pourtant. Il l’explique principalement par les défaillances russes : quand les munitions arrivent sans la bouffe et la bouffe sans les munitions, le régiment bât de l’aile, nous explique-t-il en pensant arborer le solide bon sens des officiers de toujours.
Et pourtant, tout de même, Lecornu a ressenti un traumatisme : « la sidération des acteurs face à la révolution des petits drones », pas plus anticipée en France que la micro-informatique ne l’avait été au temps du Minitel ! Cette révolution est une leçon ukrainienne. La conclusion de Lecornu n’est pas la popularisation de la confection des drones que l’on a en Ukraine, mais le partenariat public-privé généralisé, les innovations passant aujourd’hui du secteur civil au secteur militaire, avec en perspective l’IA, les imprimantes 3D et l’informatique quantique. Cet aspect « public-privé » est aussi d’ailleurs une dimension ukrainienne, mêlant la débrouillardise forcée des populations et l’orientation néolibérale du gouvernement.
Mais ce n’est pas un Lecornu qui va faire connaître en France ces autres dimensions de la guerre populaire ukrainienne investissant une armée de métier : la pression des soldats sur les chefs ; l’auto-organisation à l’arrière pour les nourrir, les soigner, repriser leurs équipements … ; la disparité des tenues avec des symboles syndicaux et politiques ; le maintien du lien syndical chez les soldats-mineurs ; l’apparition d’organisations de femmes soldates revendiquant toute leur place et promouvant les droits des femmes à l’échelle de toute la société ; l’apparition de structures syndicales de soldats LGBT ; etc. Rien de tout cela n’a été accordé, tout a été conquis dans les faits, et tout cela fait partie des conditions vitales de la résistance ukrainienne. Le lien entre un appareil militaire professionnalisé et le peuple mobilisé est donc tout à fait concevable, et implique à l’évidence une place égale des femmes. Mais il ne se réalisera jamais au service d’un Etat impérialiste tel que la France.
Cela étant, ce petit livre est d’une grande clarté et ne manque pas de qualités. Il est temps que les milieux tournés vers l’émancipation, les milieux révolutionnaires, développent leur propre réflexion militaire, vers la guerre, certes et hélas, mais vers la guerre-révolution.
VP, le 16/11/24.
Très juste !
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VP, le petit soldat pabliste avec sa « guerre-révolution » et son soutien à l »explosion des dépenses d’armement, c’est à dire en réalité, en dehors des phrases leurres, la guerre contre la révolution !
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La guerre approche et Coquema ne pose pas la question du comment s’opposer à l’axe Trump-Poutine-Netanyahou…
Peut-être qu’au lieu de réfléchir à partir des éléments de la PMP formulée par Trotsky dans les derniers mois de sa vie, il préfère puiser dans la tradition du pacifisme intégral à la Félicien Chalaye ou à la Jean Giono ?
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Sur la programmation militaire 2020-230, la poursuite des programmes des VBMR et des EBRC jaguar – qui ont démontré en Ukraine leur inefficience absolue sur un front européen – engins adaptés la guerre du sahel, hier, mais nul face à la puissance de feu le plus moderne – laisse soupçonner quelques arrières-pensées. La menace russe devient le prétexte – sachant que l’Etat français, spécule sur une paix rapide avec la Russie de Poutine, qui se maintiendra – à un réarmement qui pourrait -demain- tout aussi bien « réinvestir l’Afrique », derrière le Royaume du Maroc par exemple.
En tous les cas les deux options restent ouvertes. L’extrême-droite ne rêve que d’en découdre avec l’Algérie, avec « les arabes » en général. La « menace existentielle » est perçue de ce côté – avec le mythe de la 5ème colonne, d’un « sionisme sournois » en Europe du monde arabe. La Russie – comme hier l’URSS (!)- est vécue comme prétexte utile, avec un adversaire dont on partage au fond « les mêmes valeurs ». La « destruction mutuelle Russie – Europe de l’Ouest », grosse de révolutions sociales et de guerres civiles intenses, serait prétexte à la prise d’hégémonie de l’Empire califal arabo-musulman, blabla ad nauseam.
Il faut aussi réfléchir rétroactivement au caractère fallacieux de ce qu’avait été l' »aide soviétique » au pays du tiers-monde : la pure « phase primitive de l’accumulation » par importation-transplantation d’appareils de coercition policiaro-totalitaire, préalable à maturité d’un « retournement comme un gant » à l’ouverture absolue aux « marchés mondiaux » (Congo, Angola etc.), ou consolidation trouble des petro-dictatures au fil de la montée de la rente énergétique captée par la bureaucratie. Ce sont toujours sur les mêmes réseaux et les mêmes méthodes que s’appuie la mafia du Kremlin. Une insuffisance de caractérisation de ce qu’a été l’URSS, conduit à une insuffisance de compréhension de ce que « fait la Russie de Poutine », combien aussi elle est au cœur des « raisons d’état » occidentales. L’ennemi est dans notre propre pays !
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Je ne remonterai pas sur l’analyse-dans-le-système-européen que faisait Marx au 19ème siècle de la Russie, et en quelle mesure, la contre-révolution nationale-stalinienne – dont la logique « opérationnelle » prit le pouvoir dans le processus des longues guerres civiles – dès le ralliement de Brousilov et l’émergence d’une « stratocratie » surplombant tout l’édifice, recrutant et adoptant dans les « meilleures pratiques » de police et de militarisation- n’a tout simplement prorogé et occupé la même place de l’entité « russe » au sein du « système-monde » cette fois-ci. Le capital se déploie comme coexistence d’hétérogénéité structurale, où tout tiers ou quart monde a autant de fonctionnalité systémique que le premier ou le second. Il faut peut-être regarder du côté du « marxisme des systèmes-mondes », voir des « écologies-mondes » (qui tendent à rompre avec le « dualisme cartésien », redonnant comme un « coup de fraicheur » à la « dialectique de la nature »), venu des USA et du Japon, pour modéliser les tenants et aboutissants du rapport centre / périphéries pertubatrices. Trump est peut-être impensable sans Poutine, ils sont objectivement, sinon subjectivement, des Alliés, y compris dans l’affrontement militaire limité – ces auto-limitations consistent en le maximum de destruction compatible avec une paix sociale interne -qu’ils savent l’un et l’autre mener. Trump est la vérité de Biden, de l’action des appareils de coercition US…
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