Consacré à Pierre Lambert, le livre de François Bazin est de bonne facture. Il a travaillé sérieusement : consulté les archives, les textes, rencontré de très nombreux témoins… sauf ceux qui, comme Glukstein, ont refusé. C’est un travail honnête, de surcroît talentueux. Il ne règle pas de compte, et même au fil de la plume, manifeste une certaine estime pour son personnage. Bref, une biographie réussie…
Lorsqu’il est venu me voir, je lui ai conseillé l’excellent travail de Pierre Salvaing (1). Comme Vincent Présumey, Pierre fut un dirigeant de l’OCI, puis animateur du groupe de Stéphane Just jusqu’à sa mort et même après… Il est naturellement marqué comme chacun d’entre nous par cette histoire. Ce n’est pas le cas de l’ancien rédacteur en chef du Nouvel Observateur qui a entrepris de raconter la saga militante d’une génération dans les pas de Lambert. Le plus souvent, les journalistes se moquent, dénigrent les organisations de la IVe Internationale.
Au contraire, François Bazin a essayé de « suivre » sans a priori la trajectoire de Lambert. Pierre Salvaing, Vincent Presumey qui critiquent le travail procèdent d’un autre point de vue à partir de leur vécu militant.
C’est le point de vue d’anciens trotskystes n’ayant pas renoncé à penser le socialisme. François Bazin ne se situe pas sur ce terrain. Il a fait un très bon travail en racontant la trajectoire du jeune Lambert rejoignant les rangs – déjà divisés – de la IVe Internationale se hissant progressivement à la tête du groupe portant son nom sans oublier de relier cette histoire… à la situation internationale.
Rappelons les grandes lignes du « pronostic » politique de Trotsky à la veille de son assassinat …
De la guerre naitront des révolutions qui modifieront l’ordre mondial au profit du prolétariat. – La bureaucratie stalinienne sera chassée en URSS par la classe ouvrière, la révolution politique restaurera les conditions du socialisme.
Rien de tel n’a eu lieu.
C’est l’impérialisme américain et… Staline qui sont sortis victorieux de la guerre, le système capitaliste conforté, les incendies révolutionnaires étouffés.
C’est dans ces conditions autrement moins favorables que Lambert et les autres militants entreprirent de résister et construire. Pour faire court, disons que le mouvement trotskyste français dans sa globalité, sa diversité, n’est jamais parvenu à se rassembler pour former un parti démocratique comme section du parti mondial de la Révolution.
« La crise historique de l’humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire ». (Programme de Transition) Répété à satiété la « crise de la direction révolutionnaire » n’a jamais été surmonté positivement. Le « national troskysme » l’a emporté. Lorsque je travaillais à Cuba, j’ai rencontré le grand écrivain Padura, l’auteur de « L’homme qui aimait les chiens ». Je croyais qu’il avait une culture trotskyste. Pas du tout. Il m’expliqua qu’il avait travaillé plus de deux ans à lire, essayé de comprendre les œuvres de Trotsky et les textes des organisations, leurs discussions, leurs divergences, la ronde des scissions. Il me rappela le départ de la IVe de la femme de Trotsky… jugeant les espoirs de son mari caducs. J’avais oublié cet évènement qui n’est pas anecdotique…
Vincent et Pierre insistent sur l’importance du combat international de P. Lambert. C’est très discutable : ni lui, ni les dirigeants anglais, argentins, américains, boliviens, belges and co n’avaient la conception d’un parti mondial de la révolution. Chacun traitait pour son… propre pays. Dans les années 60, avec Claude et Xavier, j’ai participé à la commission jeune franco-anglaise à l’époque des amours – déjà difficiles – entre l’OCI et la SLL. Chacun d’entre nous avait pour mandat de proposer des initiatives communes mais sans jamais mettre en discussion l’orientation politique… dans notre propres pays…
Comment expliquer la dégénérescence politique de Lambert et de l’organisation ?
D’abord avant tout, répétons-le, l’absence de démocratie, de débat démocratique. Des échanges existaient au BP, presque jamais au CC mais même dans ces instances, la discussion était encadrée par un non-dit qui nous liait tous : attention de ne pas faire éclater la maison. Le passé du mouvement fait de divisions, scissions pesait sur nous.
Souvent Lambert rappelait ce danger. Puis la corruption politique et organisationnelle, financière, s’est progressivement développée. La création d’un corps de permanents, à l’initiative de Lambert, a joué un rôle majeur. Au Comté central, ne siégeaient, à part Broué et Stéphane Just, que des « professionnels ». La défense « de l’emploi » jouait un rôle majeur… De même, l’affirmation « la crise conjointe de l’impérialisme et la bureaucratie du Kremlin » écrasait politiquement l’organisation : la « rapidité » des processus annoncés qui allait conduire à la révolution comme une certitude, pesait sur l’activité militante, au premier chef sur la direction qui, selon Lambert, « oscillait » en permanence puisque la plupart des objectifs n’étaient pas atteints… La révolution s’annonçait et nous risquions de ne pas être prêt ! Le parti des « 10.000 » devait absolument voir le jour…. Le diagnostic théorique était totalement faux : nous avons été des révolutionnaires… sans révolution.
La démocratie n’est pas une décoration, une nécessité parmi d’autres : c’est le cœur vivant d’une organisation, l’organe essentiel. Ce n’est pas par hasard que les acquis théoriques de Rosa Luxembourg sur cette question étaient écartés. Par contre, la religion de « l’organisation » pour appliquer la méthode « objectif – résultat » portée au pinacle, a étouffé réflexion et discussion. La course, l’activisme pour atteindre les objectifs, ont épuisé les militants. L’intérêt du livre de Bazin, comme des textes de Pierre et Vincent, permet d’avancer dans l’analyse de l’OCI à cette période. Et puis nous disposons maintenant du recul nécessaire pour réfléchir à ces problèmes, sans polémiques inutiles.
Plus l’organisation s’est développée et plus Lambert s’est rapproché de l’appareil confédéral de FO jusqu’à devenir l’un de ses « rouages ». Soit la fin du combat antibureaucratique au profit des manœuvres syndicales. L’explosion de la FEN provoquée notamment par le passage des militants OCI à FO puis la rupture, le départ des cadres étudiants chez Mitterrand apportant au Parti Socialiste, l’UNEF, sont les évènements majeurs qui marquent le début de la fin de l’OCI… Les trotskystes n’interviennent plus dans les syndicats en fraction politique, défendant les intérêts des salariés mais comme groupe de pression sur et… avec l’appareil. Enfin, ceci explique cela, Lambert liquide le travail politique dans la jeunesse (l’AJS, l’AER) au profit de l’UNEF.
Mais dans le livre sur Lambert comme tous ceux publiés sur l’OCI, manque un élément international majeur : la création du PT algérien par Louisa Hanoune en étroite collaboration avec Lambert. Ce parti est d’emblée conçu, construit en lien direct avec les sommets du FLN et de l’UGTA, c’est-à-dire du président Bouteflika ! Le groupe parlementaire du PTA était « élu »… dans le bureau… du ministre de l’Intérieur algérien ! Cette opération politicienne pourrie concentre la dégénérescence2 de l’activité de Lambert (2).
Évidemment, cela s’est fait en collaboration étroite avec la direction de FO.
À de nombreuses reprises, l’OCI et le Parti Algérien ont à Alger, organisé des « conférences internationales », saluées par les dirigeants du FLN et de l’UGTA…
Les jours de fête et les dimanches, Lambert affirmait une politique « trotskyste » pour, en semaine, pratiquer une politique néo réformiste. Il suffit d’évoquer sa candidature à l’élection présidentielle… François Bazin rappelle que cette candidature a pour objectif de protéger Lambert des fourches de la justice dans une « affaire » qui a éclaté à la Sécurité Sociale… Plus l’OCI recrutait, du moins sur le papier, moins il rassemblait des électeurs…
Pierre Lambert avait évidemment du talent. Au bout du bout, il a été le « Guy Mollet » du trotskysme. Une catastrophe humaine, politique, militante…
Après sa mort, l’OCI a rapidement éclaté en deux formations, chacune se réclamant du « Lambertisme » ! L’OCI « canal historique » a rallié les Insoumis, plus précisément JL Mélenchon, abandonnant toute activité politique indépendante, toute critique théorique, par exemple sur « l’agonie de la Ve République » annoncée depuis… 1968 ! Il faut dire que Dan, Shapira, Schiappa n’ont jamais brillé par leurs lumières théoriques. Du côté du PT animé par Glukstein, on a repris l’activisme et la méthode « d’objectif – résultats ». Bon courage.
En somme, le livre sur Lambert permet de réfléchir au passé en nous interrogeant sur l’actualité pour la construction d’un parti révolutionnaire, d’une Internationale ? À dire vrai, je confesse que je ne crois plus, depuis longtemps au concept même de Parti Révolutionnaire. Le siècle nouveau appelle d’autres réponses. Il faut réfléchir aux problèmes politiques que les militants doivent aborder : comment lier la lutte de masses contre les multinationales pour sauver l’humanité de la crise écologique ? Comment aborder la lutte contre les guerres impérialistes ? Et comment définir avec les salariés un programme d’urgence sociale ? Et le couple démocratie – liberté ?
Nous vivons une nouvelle phase du néo-libéralisme. Aux États-Unis, en Argentine, Hongrie, Russie, Israël, Italie, c’est l’ère des gouvernements dictatoriaux plus ou moins affirmés, penchant souvent vers un fascisme new look. Le ministre de la défense vient de publier un livre titre : « Vers la guerre ». Pour l’heure, la classe ouvrière recule, la jeunesse est entrainée par la société de consommation…
Les plus récentes découvertes sont mises en œuvre par le Capital pour « gagner la guerre économique ». L’IA va amplifier l’offensive contre la classe ouvrière internationale mais aussi d’intellectuels, « moderniser » l’utilisation des armes (3) de destruction massive… Trump va mettre en œuvre son programme : protéger son marché par tous les moyens, expulser en masse les « étrangers », porter atteinte aux libertés, tout mettre en œuvre pour faire exploser l’Europe, rester « l’Arsenal » du monde et bien sûr, réorganiser son dispositif militaire international contre la Chine. Pour la première fois aux États-Unis, des grands capitalistes se retrouvent au gouvernement ! Dans l’automobile, les ports de la côte Ouest, chez Boeing, de grandes grèves ont éclaté. Les salariés n’ont pas gagné, mais… ils n’ont pas perdu. C’est nouveau.
La mobilisation, la lutte des classes va-t-elle se poursuivre, s’amplifier ? Nul ne le sait. Les articles édités dans la revue « l’Adresse » notamment sur les États-Unis donnent à réfléchir. Espérons que les rédacteurs trouveront des correspondants dans les principaux pays européens pour nous aider à élargir le champ de la discussion politique.
Crises politiques en France, Pologne, en Belgique, éclatement du gouvernement allemand, révolte du peuple en Catalogne face à l’incurie des gouvernements. La crise des sommets est indiscutable. «L’aggravation plus qu’à l’ordinaire de la misère et de la détresse des classes opprimées » et « l’accentuation de l’activité des masses » caractérisent selon Lénine une situation révolutionnaire. Nous n’y sommes pas. Nous en sommes loin. Espérons que nos discussions permettront d’avancer.
Jacques Kirsner, 14/11/2024.
(1) Pierre que j’ai connu plus inspiré caractérise le journaliste de « petit bourgeois ». Sans doute
Pierre fait-il allusion à sa position « prolétarienne »…
(2) Décidément l’Algérie n’a jamais réussi à Lambert…
(3) Israël utilise l’IA pour définir les objectifs à bombarder à Gaza et au Liban…
Les divers « bilans » du lambertisme qui surgissent ces temps-ci de ci de là ont tous un point en commun, ce qui constitue tout de même un exploit! Aucun d’entre eux ne mentionne le point aveugle de la pensée de Lambert qui était, après Trotsky lui-même, urbain indécrottable dont la culture « naturaliste » était nulle comme l’a bien montré Tanuro, l’ignorance absolue des problèmes posés par la crise environnementale.
Il n’était pas le seul à l’OCI. Dans un charmant petit livre (Pour voir clair) dont je recommande par ailleurs la lecture (bien que sa fascination pour la fréquentation des gens ayant une notoriété importante soit un peu énervante), Michel Broué évoque à juste titre cette question, mais gâche tout juste après, en disant qu’à l’OCI Gérard Bloch faisait exception, car il avait compris ces problèmes. Gérard Bloch était, comme Michel Broué, mathématicien, et bénéficiait à ce titre au sein de l’OCI d’une « aura » de scientifique, compétent dans tous les domaines ayant de près ou de loin à voir avec la science. Il faut toujours se méfier des grands esprits universels qui savent tout et ont tout compris, et sont vénérés comme des gourous par leurs adeptes, car ils sont comme tout le monde susceptibles d’erreurs, surtout lorsqu’ils s’éloignent de leur domaine d’excellence.
Le Sieur Bloch ne faisait pas exception à cet égard, comme je l’ai signalé ailleurs. Un de ses morceaux de bravoure fut la fois où dans un meeting de l’AJS où j’avais parlé des extinctions d’espèces et pris pour ce faire l’exemple des tigres (de chair et pas de papier, mais c’est une autre question sur laquelle je reviendrai), il m’avait répondu de la tribune que cela n’avait aucune gravité, car après la révolution le socialisme refera des tigres ! On attend toujours la révolution et les tigres sont plus que jamais au bord de l’extinction, malgré les mesures prises en leur faveur.
Il ne s’agit pas de vanter mes mérites, mais je persiste à croire que si l’OCI avait accepté de discuter mes 4 articles parus dans IO en 1987 sous le titre « Marxisme et écologie », ainsi que d’autres textes reçus par la direction qui eux ne furent jamais publiés, étant donnée l’influence indéniable de l’organisation pendant longtemps, la question écologique aurait peut-être pu commencer à être discutée au sein du mouvement ouvrier des dizaines d’années avant l’émergence de l’« éco-socialisme », et peut-être le mouvement « écolo » réformiste, pour ne pas dire pro-capitaliste, ne se serait pas épanoui comme il l’a fait pour devenir pendant longtemps la seule expression de ce problème, devenu crucial pour la survie de l’humanité…
On ne peut tirer le bilan du « lambertisme » sans mentionner cet aspect de la culture de ce mouvement qui, combiné avec son « macho-virilisme », son antiféminisme, sa phobie de la psychanalyse et autres scories, lui a mérité de façon pas si injuste que cela la qualification d’« archéo-marxiste » qui lui a longtemps été attachée ‒ en fait et paradoxalement à tort, car Marx et Engels avaient une réelle culture naturaliste et avaient déjà formulé avec une remarquable prescience plusieurs des idées de base de la pensée « écologiste » matérialiste.
Alain Dubois
15 novembre 2024
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Tu as absolument raison pour l’écologie et pour les conséquences très importantes de ce point aveugle. Rien n’explique ni ne justifie cette carence, alors que le souci est déjà présent chez Marx, que « Un printemps silencieux » de Rachel Carson est paru en 1962, ainsi que plusieurs autres livres décisifs, en dehors de ton propre travail, et alors également que la question de l’écologie s’intègre parfaitement dans l’avertissement de Trotski « sans révolution socialiste dans la toute prochaine période l’humanité sombrera dans la barbarie ».
Gérard Bloch comprenait cela, mais n’avait pas la carrure pour élever la voix sur quelque sujet que ce soit. Et moi, qui ai lu, et approuvé (et conservé) ton premier texte sur ce sujet (années 70), j’étais loin d’avoir droit au chapitre.
Par contre, je ne dirai pas que nous étions « antiféministes », ni machistes, mais cela se discute.
Ni que Lambert était « hostile à la psychanalyse ». Dans le « Foulan » (globalement très mauvais), les deux compères se servent de Freud pour bastonner Lacan. Lambert déclare solennellement que les découvertes de Freud sont un acquis de l’humanité.
Chisserey m’a personnellement dit que le trotskisme n’a rien contre le principe de l’analyse… mais comme l’analysant doit dire TOUT ce qui lui vient… ce n’est pas possible pour raison de sécurité.
Je m’en souviens avec beaucoup d’amertume, parce qu’une analyse aurait peut-être sauvé ce type que j’admirais et que j’aimais énormément.
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« De la guerre naitront des révolutions qui modifieront l’ordre mondial au profit du prolétariat. – La bureaucratie stalinienne sera chassée en URSS par la classe ouvrière, la révolution politique restaurera les conditions du socialisme.
Rien de tel n’a eu lieu ».
FAUX à deux niveaux :
Révolution en Grèce, crises révolutionnaires en France, en Italie…, mouvements révolutionnaires en Europe de l’Est contraignant la bureaucratie à exproprier le capital (malheureusement par le haut, laissant la bureaucratie stalinienne maîterre d’oeuvre, révolution chinoise en 1949, vagues de décolonisations massives…
Trotsky formule une alternative et non pas une affirmation dans le programme de transition: ou la révolution politique en URSS, ou la buraucratie ouvrira la voie à la estauration capitaliste….ce qui fut le cas !
« De même, l’affirmation « la crise conjointe de l’impérialisme et la bureaucratie du Kremlin » écrasait politiquement l’organisation : la « rapidité » des processus annoncés qui allait conduire à la révolution comme une certitude, pesait sur l’activité militante, au premier chef sur la direction qui selon Lambert, « oscillait » en permanence puisque la plupart des objectifs n’étaient pas atteints… La révolution s’annonçait et nous risquions de ne pas être prêt ! »
Imminence de la révolution…. PAS FORCEMENT EN FRANCE NI DANS UN SEUL PAYS !! Révolutions portugaise, polonaise…..Quant à la France, n’est-ce pas C.Berg ( bien connu de J.Kirsner!) et S.Just qui expliquaient en 1973 qu’un Gouvernement PS-PCF sans ministres capitalistes pouvait ouvrir la voie au socialisme, ce qui frayait la voie au futur et fameux « Front populaire à la croisée des chemin » de 1982…..le même Kirsner qui soutient aujourd’hui avec V.Présumey le NFP, « Front populaire, dernière ressource de l’impérialisme, avec le fascisme, contre la révolution prolétarienne » (Trotsky) !
Et effectivement, les grandes grèves victorieuses au USA , la puissance de la classe ouvrière américaine faisant face à leurs directions syndicales qui se sont honteusement couchées derrière le vote Harris ( tout comme le NFP et leurs lèche-culs en France ) ouvrent la voie à un LABOUR PARTY aux USA avec son aile révolutionnaire trotskyste !
«L’aggravation plus qu’à l’ordinaire de la misère et de la détresse des classes opprimées » et « l’accentuation de l’activité des masses » caractérisent selon Lénine une situation révolutionnaire. » Nous n’y sommes pas. Nous en sommes loin nous dit Kirsner.
Effectivement, on peut vraiment compter sur le démoralisé Kirsner pour nous mettre en scène non pas donc l’imminence de la révolution mais l’imminence de la contre-révolution avec tous les gouvernements fascistes déjà victorieux en Europe et celui à venir avec Le Pen-Bardella, liée à l’impuissance affirmée de construire quel que parti révolutionnaire que ce soit !
Une seule révolution victorieuse dans un pays européen ( sans parler des Etats-unis) et c’est pourtant la porte ouverte à toute une chaîne révolutionnaire pouvant contrecarrer l’imminence, et elle bien réelle et dèjà bien enclenchée, de la troisième guerre mondiale .
Des dizaines de milliers de militants et sympathisants sont d’ores et déjà disponibles, pour peu, par exemple, que le PT, LO, le NPA-Révolutionnaires sachent surmonter leurs désaccords bien moins nombreux que leurs points d’entente et ouvrir une perspective commune.
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Dans mon commentaire ci-dessus, j’ai donné par erreur la date de 1987 pour la publication de mes articles sur « Marxisme et écologie » dans Informations Ouvrières. Il s’agit en fait de 1977 (voir https://lherbu.com/2018/10/ecologie-marxisme-et-lambertisme-5-resume-et-conclusion-les-lambertistes-face-a-la-crise-anthropocene.html). Désolé pour cette inadvertance.
Alain Dubois
16 novembre 2024
Réponse
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Revue « L’adresse » ?
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Voir dans le répertoire que nous consacrons à cette revue impliquant d’autres partenaires que la seule rédaction d’Aplutsoc qui soutient ce projet.
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Sur « Le parrain rouge » * (Pierre Lambert vu par F. Bazin), encore.
Non, P. Lambert ne fut pas « un parrain », mais le dirigeant d’une formation authentiquement révolutionnaire, finalement hélas assujettie à son magistère en tant qu’incarnation du Trotsko-Léninisme ravalé lui-même à une pure foi…
Soit « une dégénérescence charismatique » une nouvelle fois à l’œuvre dans le mouvement communiste.. mais qui n’a évidemment pas commencé avec le courant lambertiste du trotskisme ni même avec le stalinisme, contre lequel ce courant avait pourtant commencé à constituer, à la suite du premier Trotskysme, sans doute la plus vigoureuse des résistances théorico-pratiques.
Pour nous comme pour beaucoup d’analystes et pour aller vite, c’est à la séquence léniniste de l’Histoire des mouvements révolutionnaires à laquelle il semble bien que nous devions remonter pour comprendre et affronter ça, le « Léninisme » et la première version qu’il a donnée d’outils enfin effectivement ad hoc pour une première révolution prolétarienne victorieuse :
Car c’est sans doute l’énorme prestige, combien compréhensible, acquis là par le Parti Bolchévique et son chef, à l’autorité rapidement augmentée à l’échelle mondiale en une véritable » aura » (pour continuer dans un vocabulaire wébérien**..) à quoi il faut attribuer la montée..catastrophique qui va suivre, de cette extraordinaire capacité du « Parti » à susciter une soumission quasi religieuse de ses membres et dont se verront ensuite investis les partis et leurs dirigeants aptes à incarner « la continuité » de Lénine et du bolchévisme vainqueur .
Et n’est-ce pas ainsi qu’on peut sans doute comprendre le problème que devrait sinon poser encore à nos générations, le phénomène historique de « l’Aveu », à commencer par les aveux des grands Procès de Moscou, ces épouvantables «aveux» d’innocents, tous membres de la fine fleur du Parti Bolchévique historique, d’avant « la stalinisation » ? Et poser celui des mécanismes de soumission à l’oeuvre pour produire ces aveux chez des révolutionnaires au-dessus de tout soupçon, hélas sans même souvent se les être fait extorquer sous la torture..mais acceptés « pour servir encore, une dernière fois, le Parti», comme le dirent et l’écrivirent certains d’entre eux, ce « Parti » devenu incarnation hypnotique du sauveur du monde ?
Ni le livre de F. Bazin ni celui de L. Mauduit et D. Sieffert (également récemment paru) ne se sont attachés à ma connaissance à ces traits sensibles de « domination et de soumission charismatiques » dans les formations révolutionnaires post-léninistes, particulièrement frappants dans le monde lambertiste pour de nombreux observateurs et.. »sujets » de l’intérieur « réveillés », éléments pourtant peut-être décisifs dans la splendeur et la chute de cette formation.. après celles de son « modèle » historique.
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Lévy peut se reconvertir dans la psychanalyse, il en est fin mûr et d’ailleurs il n’hésite pas à se contredire dès le deux premiers paragraphes !!
« finalement hélas assujettie à son magistère en tant qu’incarnation du Trotsko-Léninisme ravalé lui-même à une pure foi… »
puis : dégénérescence charismatique « contre lequel ( laquelle voulait-il dire ! ) ce courant avait pourtant commencé à constituer, à la suite du premier Trotskysme, sans doute la plus vigoureuse des résistances théorico-pratiques. »
« Pas plus « le premier Trotskysme » que le troisième avec le courant trotskyste du Parti des Travailleurs et D.Gluckstein ne sombrent dans cette ‘dégénérescence charismatique » contrairement à tous les ex, faux et anti-trotskystes qui communient TOUS dans les jupes du NFP (POI en tête après avoir justement exclu son courant troskyste pour pouvoir mieux sombrer dans le mélenchonisme) » Front populaire, dernière ressource de l’impérialisme, avec le fascisme, contre la révolution prolétarienne » comme le dit Trotsky qui, avec Lénine, l’ont montré en aidant à briser victorieusement le premier Front populaire de l’Histoire en mars-octobre1917!
L’Histoire ma fois , et non ma foi !, nous montre la seule voie à suivre: chasser Macron-Barnier-Le Pen et les institutions de la Cinquième république, contre TOUT Front populaire, pour un Gouvernement ouvrier seul à même de rassembler TOUTES les catégories populaires et la jeunesse, d’exproprier les capitalistes et de tendre la main à tous les peuples travailleurs.
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Outre votre charabia ridicule et votre contresens évident sur ces passages de mon commentaire que vous »citez », vos proclamations infantiles de zélote du seul Trotskisme de la vraie Foi confirment encore de manière pathétique la poursuite du syndrome dans.. « le troisième Trotskysme » .
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https://books.google.fr/books/about/Qu_est_ce_que_l_A_J_S.html?id=EVrOygAACAAJ&redir_esc=y ).
.. Sur le sujet du devenir « secte » du courant lambertiste, si quelqu’un(e) pouvait me le proposer à la vente en m.p.*, je serai preneur de ce petit bouquin sans doute précurseur d’ Henri Weber, paru d’abord en Cahiers « Rouge », et re-publié par F. Maspero avec une préface de P. Frank : « Qu’est-ce que l’AJS ? »…
( * marcdaniellevy5@gmail.com)
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Vous ne comprenez même pas votre propre contradiction dès le début de votre texte…..on voit le niveau !!
Quant à la suite, tout se concentre dans votre soutien au nouveau Front populaire, l’une des deux solutions de l’impérialisme contre la révolution prolétarienne (dixit Trotsky)…. en matière de dégénérescence, charismatique ou pas, vous êtes un expert !
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Hare Khrishna Hare Khrishna
Khishna Khrishna
Hare Hare !
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J’ai de larges désaccords avec le texte intéressant de Jacques Kirsner.
Je rectifie d’abord une erreur : je n’ai jamais été un dirigeant de l’OCI, je n’ai jamais fait partie de son prétendu comité central. Tout cela figure dans mon travail de 2016
Jacques Kirsner a eu pleinement raison de rappeler la position de l’OCI vis-à-vis de l’Algérie et de l’organisation qu’elle y a soutenue. J’ignorais que la compromission allait jusqu’à ce point de pourriture.
« Sapo 421 » a tout à fait raison de rappeler non pas la feinte ignorance, mais la véritable hostilité de la direction de l’OCI envers les questions dites écologiques. J’ai retrouvé à ce sujet un remarquable texte de Bulletin intérieur de mon ancien camarade Mazel pour le XXII ème congrès de 1979, qui se concluait ainsi:
« La cellule Mazel (…)
-demande que soit publié dans ‘I.O. » le texte envoyé par Mazel [à propos de l’écologie].
-demande que la direction de l’OCI impulse la discussion sur les questions soulevées (écologie et nucléaire)
-estime incorrect le raprochement fait dans « IO » n°814 entre les écologistes réunis à Montredon et le fascisme de Doriot et du colonel de la Roque. Elle demande qu’une rectification soit apportée dans le journal.
-estime que l’OCI aurait dû, après les affrontement de Creys-Malville:
Elle demande que la direction de l’OCI explique sa position sur cette question. »
La direction de l’OCI ni aucun autre article de Bulletin intérieur ne donna suite à ce texte (que je peux fournir à qui le demandera).
Mais peut-être cela n’est-il pas sans rapport avec le « projet de résolution sur l’écologisme » qui fut publié dans un Bulletin intérieur préparatoire au congrès suivant, le XXIIIème, qui suivit le précédent de quelques mois seulement. Gérard Bloch en était l’auteur. Jean-Pierre Boudine avait déjà à l’époque critiqué à juste titre à mon avis ce projet, à quoi Gérard Bloch avait répondu : ce fut la seule discussion, et le « projet » resta en l’état, à l’état de projet, sans être soumis à la discussion du congrès. (je possède aussi ces textes).
Il faut également rappeler que l’OCI se prononça et même manifesta je crois, toujours cette même année 1979, « contre la loi Veil », arguant qu’elle n’allait pas suffisamment loin dans la voie de l’avortement libre et gratuit.
Mes désaccords avec le texte de Jacques Kirsner portent sur d’autres questions. J’en aborde ici deux:
1/ J.Kirsner parle des « pronostics » de Trotsky que la situation mondiale aurait par la suite totalement infirmés.
Il faut rappeler qur Trotsky ne s’est jamais pris pour un prophète. Les hypothèses qu’il formulait ainsi étaient autant d’indications d’encouragement au combat pour la jeune IV° Internationale, c’étaient les propos d’un dirigeant politique, de même que ses dernières paroles indiquaient sa « certitude » de la victoire de la IV°Internationale.
J.P. Boudine rappelle à juste titre la phrase de Trotsky « sans révolution socialiste dans la toute prochaine période l’humanité sombrera dans la barbarie ». Les textes de Trotsky écrits en 1940, notamment son Manfeste d’alarme, sont également sans ambiguité sur l’alternative urgente à laquelle la toute jeune et minuscule internationale devait faire face dans une situation d’une difficulté extrême, et dont l’issue ne pouvait être écrite dans les astres. On peut perdre un combat, et c’est ce qui eut lieu, et pas seulement pour la faible et vacillante IV° Internationale, surtout privée de son principal dirigeant.
2/ J.Kirsner se sert de Leonardo Padura, l’auteur cubain de l’Homme qui aimait les chiens pour prétendre que Natalia Sedova Trotsky avait quitté la IV° Internationale « jugeant les espoirs de son mari caducs« .
J.Kirsner aurait été mieux inspiré en relisant l’admirable lettre de Natalia Sedova Totsky du 9 mai 1951 au Comité exécutif de la IV° Internationale. Je partage le contenu de cette lettre, et j’ose même hasarder que Trotsky lui-même aurait pu le partager. De la même façon que Marx a pu écrire plusieurs fois qu’il n’était pas « marxiste », je pense que Trotsky aurait pu écrire qu’il n’était pas « trotskyste », surtout dans le sens qui lui fut si majoritairement donné après sa mort. Lambert a très longtemps imposé dans l’organisation sa formule « les rapports d’octobre vivent dans la conscience des masses », déformant ce que Trotsky en écrivait déjà en 1936, où s’ajoutait notamment le mot « encore », signifiant clairement que la détérioration très rapide des rapports entre le prolétariat de l’URSS et la bureaucratie stalinienne risquait de rendre rapidement caducs ces « rapports d’octobre ».
J’arrête là bien que la discussion soit très loin d’être épuisée.
Un détail cependant: J.Kirsner me reproche d’utiliser le terme « petit-bourgeois » pour qualifier le position sociale et politique de François Bazin. Ce terme n’est pour moi si un jugement péjoratif, ni une insulte.
Le 18 novembre, Pierre Salvaing
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Pierre Salvaing et Alain Dubois ont donné, chacun, deux éléments d’une très grande importance pour expliquer la dégénérescence de l’OCI. Pierre avance qu’il aurait dû y avoir une « relève » de la direction. Pour aller vite : Chisserey, avec Lombart et d’autres « jeunes » auraient dû prendre le risque de pousser Lambert au second rang. Chisserey s’est clairement posé la question. Je l’ai entendu de sa bouche. Il a pensé ne pas en être capable. Pourtant il faut voir qu’en 1969, 1970, 1971, 80% des militants de l’organisation n’étaient pas des « lambertistes » de longue date, puisqu’ils avaient moins de trois ou quatre ans d’organisation.
Alain demande pourquoi nous sommes passé à côté d’une dimension fondamentale de la crise de l’humanité : le désastre environnemental. Si nous n’avions pas commis cette énorme erreur, le fait que cette prise de conscience émane à priori de couches petites bourgeoises aurait pu être écarté. Pourtant, nous étions en prise avec l’alternative : une écologie marxiste et socialiste, ou compatible avec le capitalisme. Brice Lalonde, dirigeant de l’UNEF à la Sorbonne en 1969 était l’un des adversaires réguliers … de Chisserey justement. Nous pouvions être en prise avec le combat de René Dumont, par exemple.
Je souhaite apporter ma très modeste contribution à ces réflexions. D’une part, selon mon expérience, ce qui s’est passé dans la nuit du 10 mai dite « des barricades », c’est à dire que la FER, sur consigne de la direction de l’OCI, a décidé de ne pas se joindre aux combats entre la police et des étudiants, n’a pas constitué un motif de grand, lourd et long « discrédit politique » de l’OCI et plus tard de l’AJS. Oui, c’était une erreur de ne pas y être (certains y étaient, y compris un jeune que je connais bien et qui est aujourd’hui dirigeant du POI…). Oui, ce fut un moment contingent qui a joué un grand rôle dans le déclenchement du mouvement de grève les jours suivant. Mais non, nous n’avons pas vraiment payé cette erreur. J’étais à l’époque dirigeant de l’UNEF à Orsay, et je n’ai jamais entendu un étudiant se soucier de cette anecdote. Nul part dans l’UNEF (à l’exception de la Sorbonne, certes) on nous a fait ce genre de reproche. Aucun jeune ouvrier, non plus, ne s’en est soucié. Nous avions, en tous cas, tout à fait raison de faire de l’agitation devant et dans les usines sur le mot d’ordre « 500 000 travailleurs au quartier latin ».
Bien plus problématique à mes yeux, sur le moment et à la réflexion, a été le moment où nous avons cessé d’agiter le mot d’ordre : « Comité Central National de Grève ». Je pense que c’était déjà le cas fin mai. J’ai posé la question à Chisserey il m’a répondu « on arrête ; on construit le parti ». Dans l’Humanité, un journaliste a innocemment rendu compte de ce que, dans des manifestations ouvrières, des cortèges de la CGT, des militants auraient scandé : « gouvernement populaire ». Pourquoi n’y avait-il rien de comparable dans notre arsenal politique ? « gouvernement ouvrier et paysan », c’est dans le programme de transition. Cette interrogation rejoint celle qui m’a fait quitter l’OCI (OK, ça devait avoir un autre nom, mais lequel ?) en 1983. Pourquoi sommes-nous restés tellement tranquilles lors du tournant « de la rigueur » ?
Lorsque j’ai quitté l’UEC en 1966 pour rejoindre l’OCI, je cherchais une organisation révolutionnaire ouvrière qui se soucie de la transition vers un gouvernement ouvrier et paysan.
C’est sans doute pour cela que j’ai foncé (comme un imbécile) au Parti de Gauche de Mélenchon en décembre 2007. En tous les cas, Mélenchon, au moins, se soucie de l’accession au pouvoir… le problème étant qu’il veut y aller seul, et qu’il manifeste son ambivalence devant ce projet en se coupant lui-même les jarrets à chaque occasion…
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