Le projet de « Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » , commis par Gérald Darmanin est aggravé par le Sénat depuis le 6 novembre. La droite dite « d’opposition » qui joue à la surenchère sans complexe avec les positions du RN, se veut bien décidée à durcir encore le texte de Darmanin pourtant présenté par celui-ci comme « le texte le plus ferme, avec les mesures les plus dures, de ces trente dernières années ».
Les quelques mesures parfois décrites comme protectrices ou à même de favoriser l’intégration des personnes étrangères sont dangereuses et contre-productives. Quant aux autres, fondées sur une approche sécuritaire et répressive, elles alimentent les fantasmes qui associent immigration et délinquance et stimulent la xénophobie et le racisme.
Précisons que le fameux article 3 du projet de loi proposé par le gouvernement et supprimé par la droite sénatoriale stipule qu’il faudra justifier de trois ans de présence sur le territoire, et d’avoir travaillé huit mois au cours des derniers 24 mois, dans un secteur « en tension », le tout pour obtenir un titre de séjour d’un an renouvelable. Le projet de loi prévoit la création, à titre expérimental, d’une carte de séjour temporaire mention « travail dans les métiers en tension ». Cela n’a bien sûr rien d’une régularisation massive mais c’en est trop pour les amis de Larcher et de Ciotti !
Comble de l’hypocrisie, « certains des secteurs qui embauchent massivement les personnes sans-papiers (bâtiment, restauration, ménage, aides à la personne…) ne sont pas considérés comme en tension puisque leur besoin est comblé par… le recours aux personnes sans-papiers ! », ainsi que l’analyse la Cimade.
Mis en appétit et encouragés par la bienveillance de Darmanin, la majorité sénatoriale vient aussi de voter la suppression de l’Aide médicale d’État (AME) pour les immigrés sans papiers, au motif, là aussi, qu’elle créerait un appel d’air selon l’élément de langage ressassé.
Mais le vrai problème de l’AME, c’est que ceux qui devraient en bénéficier ne la demandent pas : d’après le dernier rapport de Médecins Du Monde, plus de 80% des personnes éligibles à l’AME n’y ont pas recours, avec des conséquences dramatiques pour ces personnes, qui finissent par accumuler de graves problèmes de santé. Mais aussi des conséquences négatives pour notre système de soins et pour les budgets de la santé publique, puisque, comme l’ont rappelé de nombreux médecins, il vaut toujours mieux prendre en charges les pathologies le plus tôt possible.
Macron avait déjà restreint le droit à l’AME, en 2019, quand il a décidé d’en conditionner l’accès à trois mois de présence sur le territoire. Et ce contre l’avis des professionnels de santé.
L’ appel de 3500 médecins à désobéir en soignant tous leurs patients, c’est une façonde rester fidèle à leur serment déontologique en disant qu’on donnera des soins à ceux qui en ont besoin.Un médecin infectiologue précise que « L’AME est soumise à conditions de ressources, ce sont des gens qui gagnent moins de 800 euros par mois, des gens précaires, fragiles avec des maladies lourdes qui ont un état de santé qui est moins bon que le reste de la population »
L’obsession de Darmanin c’est d’enfermer et d’expulser. « Les arguments sécuritaires et répressifs emportent tout et justifient de nier toute considération humaine des personnes », s’est indignée la Cimade, association de défense des droits des étrangers.
Après avoir voté la suppression de l’article 3 puis de l’AME, la majorité sénatoriale, a voté la suppression de l’article 4, qui devait permettre aux demandeurs d’asile originaires de certains pays d’être autorisés à travailler dès leur arrivée dans l’Hexagone. Les travailleuses et travailleurs qui resteront sans-papiers resteront donc privé(e)s d’égalité salariale, de congés, d’arrêts maladie, de droit à la retraite et soumis aux conditions de travail les plus pénibles.
Durcissement du droit du sol, conditions d’accueil détériorées, recul des droits des exilés, expulsions rapides, c’est ce que prévoit Macron avec son ministre Darmanin et la majorité sénatoriale.
Et que fait la gauche, minoritaire au Sénat dans tout ça ? Elle présente un amendement visant à octroyer une carte de séjour temporaire aux sans-papiers qui portent plainte contre les propriétaires abusant de conditions d’hébergements indignes ! La loi Darmanin serait amendable ?
Le débat sera ouvert à l’Assemblée nationale sur le projet de loi à partir du 11 décembre, après le vote solennel du Sénat du 14 novembre.
Mais le vrai débat démocratique s’ouvre dans les Comités de quartier qui préparent, dans de nombreuses villes, les marches des solidarités sur une orientation claire : Il n’y a rien à négocier dans le projet de loi Darmanin ! Unité pour lui faire échec !
Dès maintenant les Collectifs de la Marche des solidarités le disent :
« Nous ne laisserons pas passer la loi Darmanin. Nous allons multiplier actions et rassemblements. Et le 18 décembre, à l’occasion de la Journée internationale des migrants nous appelons à manifester massivement dans toutes les villes du pays pour empêcher cette loi.
Contre une société du racisme, des prisons, des barbelés et des centres de rétention. Pour la régularisation des Sans-Papiers. Pour la liberté, l’égalité des droits, la justice sociale et la solidarité. »
Le 14-11-2023.

Infos et ressources pour la mobilisation
Non à la suppression de l’Aide Médicale d’État ! Communiqué des associations, collectifs, comités, mutuelles, syndicats et forces politiques engagées dans le « Tour de France pour la santé ».
Suivre la page Facebook de la Marche des Solidarités : https://www.facebook.com/marchesolidarites/ … et son blog sur Mediapart : https://blogs.mediapart.fr/marche-des-solidarites
Suivre le blog de la campagne Unis contre l’Immigration jetable : https://blogs.mediapart.fr/uni-es-contre-limmigration-jetable
L’ appel des collectifs de la Marche des solidarités est ouvert à la signature jusqu’ au lundi 20 /11.
Ce n’est pas à première vue la fonction d’un comité de rédaction de co-signer des appels et l’on pourrait dire aussi que la micro influence d’APLutSoc ne jouera pas un grand rôle dans le succès de cette mobilisation.
Mais s’il s’agit de mettre des actes en conformité avec une analyse alors un centre politique aussi modeste soit-il ne doit-il pas prendre sa part de la lutte contre le racisme et la xénophobie en désignant les responsables qui gouvernent le pays et en combattant les reculs sociaux qu’ils prétendent imposer à coups de 49-3 ou de surenchères réactionnaires visant à rallier la droite la plus extrême ?
L’appel :
« CONTRE LA LOI DARMANIN
PERSONNE N’EST ILLÉGAL !
DE CETTE SOCIÉTÉ LÀ ON N’EN VEUT PAS !
Gérald Darmanin l’a dit : sa loi immigration est « la plus ferme avec les moyens les plus durs de ces trente dernières années ». Et devant le Sénat il a fixé l’enjeu : il s’agit de savoir dans quelle société nous voulons vivre.
C’est effectivement l’enjeu. Voulons-nous vivre dans une société raciste, sécuritaire et anti-sociale ? Ou allons-nous nous battre pour défendre nos libertés, l’égalité et la solidarité ?
Les modifications votées au Sénat dont la suppression de l’AME est devenue l’emblème durcissent encore le projet initial et étendent le champ des attaques. Elles illustrent, par leur brutalité même, la logique de déshumanisation raciste et l’ampleur de l’offensive sociale et politique ouvertes par le projet.
Car cette loi ne se contente pas de vouloir rendre « la vie impossible » pour les immigré·e·s et toutes et tous les étrangères et étrangers, harcelé·e·s par la police, emprisonné·e·s, expulsé·e·s. Elle est justifiée à répétition par l’idée, fondamentalement raciste, que les immigré·e·s, comprenez les Noir·e·s, les Arabes, les Asiatiques, les Musulman·e·s, avec ou sans papiers, né·e·s en France ou à l’étranger, seraient potentiellement des dangers et des profiteurs et profiteuses du système de protection sociale.
En retour elle légitime une société fondée sur le développement des inégalités, la déshumanisation, le contrôle et la surveillance policière, la limitation des libertés et l’exploitation sans frein de toutes et tous les travailleurs.
Nous le répétons avec les collectifs de Sans-Papiers. Ce sont les politiques racistes et anti-migratoires qui nous mettent en danger. Pas l’immigration.
Nous le répétons avec les syndicats. Ce sont les inégalités qui créent du dumping social. Pas l’immigration.
Nous le répétons avec les associations du droit au logement, ce sont les politiques publiques du logement cher qui alimentent le sans-abrisme et la crise du logement. Pas l’immigration.
Nous le répétons avec toutes et tous les professionnels de la santé, c’est l’absence de soins qui favorisera les prochaines épidémies. Pas l’immigration.
Nous le répétons avec toutes les associations. Ce sont toutes les attaques contre les libertés, dont la liberté de circuler, qui développent une société en tension. Pas l’immigration.
Nous le répétons avec tous les chercheurs et chercheuses, c’est la misère, l’atomisation et l’absence d’avenir qui créent la délinquance. Pas l’immigration.
Nous ne laisserons pas passer la loi Darmanin.
Nous allons multiplier actions et rassemblement.
Et le 18 décembre, à l’occasion de la Journée internationale des migrant·e·s nous appelons à manifester massivement dans toutes les villes du pays pour empêcher cette loi.
Contre une société du racisme, des prisons, des barbelés et des centres de rétention.
Pour la régularisation des Sans-Papiers. Pour une société de la liberté, l’égalité des droits, la justice sociale et la solidarité. »
Les collectifs de la Marche des Solidarités
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Le retrait de la loi Darmanin est aussi une revendication syndicale ! Les confédérations doivent appeler à marcher le 18 décembre !
Les salariés de l’Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) seront en grève à l’appel de leurs syndicats CGT OFPRA et ASYL ce mercredi 29 novembre, et se rassembleront devant l’Office où se tient ce jour le Conseil d’administration où siègent des représentants de cinq ministères ainsi que plusieurs parlementaires. Ils revendiquent l’amélioration de leurs conditions de travail et le retrait du titre relatif à l’asile du projet de loi « pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration », en cours de discussion à l’Assemblée Nationale.
Les salariés de la Cour Nationale du Droit d’Asile (CNDA) seront également en grève à l’appel des syndicats CGT CE-CNDA et SIPCE ainsi que les avocats de l’association ELENA-France
Ces dernières semaines, à deux reprises, plus d’un quart des agent·e·s de l’OFPRA se sont mis·e·s en grève pour dénoncer les objectifs chiffrés irréalisables qui leur sont imposés, la dégradation de leurs conditions de travail et la détérioration conséquente des conditions d’accueil des demandeurs et demandeuses d’asile et des bénéficiaires d’une protection internationale. C’est la première fois depuis plus de cinq ans que le personnel de l’OFPRA cesse ainsi le travail.
Dans leur appel à la grève les organisations syndicales de l’OFPRA notent que « le projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », discuté prochainement devant l’Assemblée nationale, a été adopté par le Sénat dans une version encore plus dure et plus violente, qui a alarmé tous les acteurs du service public de l’asile. Le volet Asile de cette loi (Titre IV) met en danger l’indépendance de l’OFPRA et l’avenir professionnel d’une partie de ses agent·e·s, avec notamment la mise en place des pôles France Asile. Il entraînera aussi la dégradation des conditions d’instruction des demandes d’asile (suppression du récit écrit des demandeurs et demandeuses, réduction des délais de convocation à l’entretien, extension des visioconférences et du placement en rétention), ainsi que la restriction des conditions d’accès à la réunification familiale pour les bénéficiaires de la protection internationale. Par ailleurs, la généralisation des audiences en juge unique à la CNDA pour les demandeurs et demandeuses d’asile effectuant un recours contre une décision de rejet de leur demande d’asile constitue une atteinte grave au droit des requérants et requérantes. »
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