L’appel au cessez-le-feu, dans le cas de l’Ukraine, ne conduit pas à la paix mais en entérinant l’occupation de territoires, il conduit à garantir les déportations de population, viols, massacres, dans ces territoires ukrainiens occupés. La voie vers la paix passe par la défaite militaire de Poutine en Ukraine, aidant du même coup tout ce qui veut la démocratie en Russie.
L’appel au cessez-le-feu, dans le cas de Gaza, conduit effectivement à l’arrêt du massacre, de l’écrasement, de l’étouffement, de la population palestinienne de Gaza (et des non palestiniens, humanitaires, etc., qui se trouvent avec elle). Il serait une étape vers la paix véritable qui passe par la prise en compte des revendications nationales palestiniennes et de l’existence de deux nations.
Les deux configurations sont symétriquement inverses eu égard à la question du cessez-le-feu. La puissance dominante exerçant une oppression nationale, serait avantagée par un cessez-le-feu dans le cas de la Russie, et n’en veut pas dans le cas d’Israël.
L’argumentation pro-israélienne contre un cessez-le-feu à Gaza, ceci dit, est souvent sincère et peut se résumer en trois points tenus pour inséparables : « le Hamas a commis des crimes contre l’humanité le 7 octobre et un cessez-le-feu fera le jeu du Hamas et puis n’oubliez pas les otages ».
Les crimes du 7 octobre doivent en effet être caractérisés pour ce qu’ils sont : des pogroms, qui ont émis le signal mondial du risque génocidaire visant les juifs, confirmé depuis dimanche, et ce n’est pas un hasard, en territoires nord-caucasiens sous domination russe, à Naltchik et à Makhatchkala. Ces pogroms n’ont en tant que tels rien à voir avec la cause palestinienne, cause nationale et démocratique totalement contredite par l’idéologie et par la charte du Hamas, et ils desservent cette cause de la pire manière possible.
Mais justement : celles et ceux qui, lorsqu’ils le disent sincèrement, ne veulent pas ou hésitent, malgré leur sentiment humanitaire, devant l’exigence d’un cessez-le-feu à Gaza, parce que cela ferait le jeu du Hamas, feraient bien de s’interroger sur une chose : le Hamas est d’accord avec eux, il ne veut pas de cessez-le-feu, ce qu’il a voulu et ce qu’il a provoqué c’est ce que l’armée israélienne est en train de faire !!!
Pourquoi ? Parce que la guerre du Hamas n’est pas la guerre nationale palestinienne de libération. Elle est une “proxy war”, une guerre par procuration, au compte de l’Iran et au compte de la Russie. De plus, il est évident et leurs familles le disent, le crient, que l’offensive militaire israélienne ne tient pas compte de la vie des otages.
Alors que précisément la guerre de l’Ukraine, elle, quels que soient les critiques ou points à discuter quant à la politique de son gouvernement (mais qui n’a rien à voir avec un quelconque Hamas et n’a commis à cette heure ni crimes de guerre ni crimes contre l’humanité, à la différence de la Russie), n ‘est pas une “proxy war”, mais bien une guerre nationale de libération.
Contre le Hamas, la vraie stratégie déjouant sa politique serait celle du cessez-le-feu, de l’arrêt de la colonisation en Cisjordanie et de la reconnaissance immédiate des droits nationaux palestiniens et donc du droit palestinien à un Etat.
S’il y avait une force politique palestinienne indépendante et du Hamas et de l' »Autorité » palestinienne, elle combattrait pour cela afin de remettre au centre le combat palestinien de libération à la place de la “proxy war” du Hamas qui lui a été substitué.
C’est aussi pour cela que l’exigence de cessez-le-feu à Gaza, en s’opposant de front à la stratégie du Hamas et à la tactique (car de stratégie, lui, il n’en a pas) de Netanyahou, est la voie vers la paix.
L’internationalisme véritable, luttant contre le spectre de la guerre mondiale, peut donc associer ces deux mots d’ordre comme base d’une perspective de lutte pour la paix et pour l’émancipation :
- pour la défaite militaire russe en Ukraine et la chute du régime de Poutine,
- pour le cessez-le-feu et l’arrêt immédiat du massacre à Gaza, et la reconnaissance des droits de toutes les nations du Proche-Orient.
VP, le 31/10/2023.
Oui, certes, votre parallèle entre les demandes de cessez-le-feu en Ukraine et à Gaza est pertinent. Mon possible désaccord porte sur la nécessaire « reconnaissance des droits de toutes les nations du Proche-Orient ». Si le sens de cette formule est la revendication de ce qu’on appelle « la solution à deux États » (je ne me sens pas capable de me prononcer sur l’utilité qu’il y a à ce que divers dirigeants la répètent en ce moment), force est de constater que ça fait longtemps que la création d’un État palestinien est devenue matériellement impossible. Pour le moment, je pense que le chemin vers la paix et l’émancipation passe obligatoirement par une pression internationale pour que l’occupation-colonisation de la Cisjordanie et le blocus de Gaza (qui est AUSSI le fait de l’Égypte) prennent fin.
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« L’imposture de deux États s’est effondrée assez rapidement parce qu’Israël n’a pas arrêté sa politique expansionniste de nettoyage ethnique et de colonisation. Un modus vivendi , une coexistence amicale, est impossible à réaliser car il entre en collision avec la nature de l’État d’Israël, dont l’existence, depuis sa fondation, est basée sur l’expulsion de ses terres et la persécution du peuple palestinien. L’État sioniste est une force d’occupation majeure en Palestine et, en tant que tel, ne peut survivre que grâce à un système de guerre permanente » citation d’un texte de PO, parti argentin , repris par RP en France
D’où la nécessité d’une Palestine laïque sur TOUT LE TERRITOIRE de la Palestine historique (regroupant Israël, Gaza, Cisjordanie et Jordanie), Palestine démocratique SEULE permettant le retour de tous les réfugiés et exilés palestiniens, Palestine respectueuse de toutes ses composantes, notamment juive et arabe, à égalité de droits. Cette revendication « démocratique bourgeoise » a toujours été au centre du programme trotskyste et ne sera réalisable jusqu’au bout que par le prolétariat (juif et arabe) réalisant sa révolution socialiste (cf la révolution permanente prônée par Trotsky, révolution associant revendications démocratiques et revendications socialistes dans un même processus révolutionnaire, face à l’impuissance des bourgeoisies nationales à l’époque de l’impérialisme).
Travailleurs juifs et arabes peuvent vivre dans un même pays, confrontés qu’ils sont au même ennemi, la bourgeoisie et l’exploitation capitaliste !!
Et d’ailleurs, déjà en Israël même, des millions d’arabes israéliens, même discriminés, vivent côte à côte avec des millions de juifs israéliens !! Oui à une Palestine démocratique et laïque, « les deux Etats » mis en avant par toutes les bourgeoisies du monde étant la vraie utopie et une véritable arnaque !
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« Je crois qu’il y a depuis quelque temps une majorité, aussi bien à Gaza ou en Cisjordanie, pour une autre voix. Pour l’instant, cette voix ne s’est pas structurée sous la forme d’un mouvement politique. En Cisjordanie et à Jérusalem, une majorité très nette des jeunes ne croit plus à une solution à deux États : ils prônent un seul État dans lequel Juifs et Arabes auraient les mêmes droits politiques et individuels. Cela peut paraître utopique, mais la solution à deux États est aujourd’hui tout aussi utopique. » Dominique Vidal (https://basta.media/Israel-Palestine-objectifs-des-attaques-du-Hamas-riposte-israelienne-bombardements-Gaza-processus-de-Paix)
Cité par la Tribune des travailleurs du 31 octobre
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Si l’on tient les deux États comme une utopie, à plus forte raison un État binational est une utopie plus utopique encore – à moins que cette notion ne recouvre la domination d’une des nations sur l’autre dans le dit État (ce que l’on a déjà de fait en Israël) …
Il est vraisemblable que les sondages dans la jeunesse palestinienne sur ce sujet traduisent deux choses : le rejet de la logique qui, d’Oslo au 7 octobre 2023, a repoussé la possibilité d’un État palestinien indépendant, et la conscience de l’imbrication des populations et donc le refus de relocaliser chacun dans « son » État, façon Inde/Pakistan si l’on veut. Effectivement, les deux États tels que je les conçois n’impliquent aucune relocalisaiton autre que celles des colons de Cisjordanie (ce qui est déjà un gros morceau), car ils sont précisément le seul cadre possible de garantie des droits politiques et individuels.
En théorie, si les deux Etats sont démocratiques et laïques, ils pourront se confédérer et plus si affinité. Mais il y a deux nations.
A noter, dans l’interview de D. Vidal, ce passage intéressant qui indique le rejet par les palestiniens de leurs « directions », quelle que soit la « solution » de celles-ci (la voie détournée vers les « deux Etats » du Fatah depuis 1993 aussi bien que l’Etat islamique exclusif du Hamas) :
« Il ne faut pas oublier qu’il existe aussi un rejet du Hamas à Gaza. L’administration de Gaza par le Hamas prend la forme d’une dictature ultrareligieuse, ultranationaliste et extrêmement brutale. Le bilan de ce qu’a fait le Hamas pour les Gazaouis, depuis sa victoire électorale en 2006, est assez maigre.
Des élections devaient avoir lieu en 2021, mais le Fatah et le Hamas ont, d’un commun accord, décidé de leur report en prétextant le refus des Israéliens d’installer des urnes à Jérusalem-Est. Si ces élections s’étaient déroulées, on aurait peut-être assisté, selon certains sondeurs palestiniens, à une victoire électorale du Fatah à Gaza et du Hamas en Cisjordanie. Les deux mouvements sont décrédibilisés dans les territoires qu’ils administrent. »
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Dialectiquement parlant, on pourrait peut-être imaginer que, dans un premier temps, sous la pression des classes laborieuses israélienne et palestinienne, il y ait rapatriment des 800 000 colons, et création d’un Etat palestinien démocratique à Gaza et en Cisjordanie, et parallèlement, une révolution démocratique en Israël qui aboutisse à la refondation de cet Etat sur des bases laïques, mettant en oeuvre une politique pour mettre fin à l’apartheid interne à Israël, pour ensuite (ou parallèlement) proposer à l’Etat palestinien nouvellement créé une union ou fédération Palestine-Israël.
Mais j’avoue une ignorance assez profonde de l’état d’esprit et des revendications des classes laborieuses israélienne et palestinienne. Côté palestinien, par exemple, j’ignore par exemple quel est le poids de l’ODSI. Le camarade palestinien interviewé dans l’Internationale 31 ne donne pas vraiment d’indication à ce sujet.
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Commentaire d’abord publié par moi ce matin sous mon dernier billet de blog personnel sur Mediapart « Entre Israël et Palestine, cessez-le-feu immédiat ! « :
« Finalement, bien qu’évidemment en accord avec les mots d’ordre officiels de la manifestation appelée à Paris ce samedi 4 novembre*, principalement par une majorité de partis et d’ associations de gauche, j’ai personnellement décidé de ne pas y participer, peu disposé à entendre et voir s’afficher les cris de haine équivoques, dont sans doute le tristement et jouissivement hurlé dans les rassemblements précédents : »ISRAËL ASSASSINS ! », sans distinction entre « le leadership » ultra-réactionnaire du pays et son peuple très gravement meurtri par les massacres du 7 Octobre qui ont initié les opérations à leur tour meurtrières de la clique Netanyahou-Gantz. »
* demandant notamment un « cessez-le-feu immédiat », un « arrêt des bombardements et des déplacements forcés de la population »
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