Il y a 8 jours, non décidément, ce n’est en rien la libération de la terre palestinienne que recherchait le Hamas en commettant une série de pogroms antisémites.

Cette opération a forcément été décidée et planifiée à un haut niveau impliquant les chefs du Hamas, du Hezbollah, de la « République islamique » d’Iran, et probablement l’émirat du Qatar. Quel sens pouvait-elle bien avoir dans la mesure où ceux qui l’ont déclenchée savaient que l’armée israélienne était en mesure de la refouler puis d’investir Gaza ?

En toute logique, force est de déduire que le but était de produire cette offensive militaire israélienne ; de faire en sorte que le gouvernement Netanyahou et l’état-major entreprennent une offensive aérienne associée à un blocus aggravé, puis une offensive terrestre, sur Gaza, faisant ainsi des milliers et des milliers de morts et déplaçant, ballottant des populations par centaines de milliers, ce qui est en train de se produire, avec la complicité active de l’Égypte qui ferme les issues situées de son côté (Rafah).

L’armée, la société et l’État d’Israël sont ainsi lancés dans une dynamique qui est celle de la purification ethnique, une dynamique potentiellement génocidaire. A Gaza, il est envisagé une occupation totale ou un rétrécissement d’un territoire déjà rétréci et surpeuplé, sous tutelle militaire, en Cisjordanie, les colons se lâchent et la population palestinienne est en danger (pour rappel : les pogroms du Hamas ont bénéficié de la concentration militaire israélienne opérée par Netanyahou pour conforter les colons en Cisjordanie !).

Mais alors, dira-ton, n’était-il pas absurde de provoquer ainsi une situation dans laquelle la Palestine et la nation palestinienne sont et seront encore plus massacrées, opprimées, disloquées ?

Pour le Hamas, qui n’est pas un mouvement national, mais un mouvement religieux supranational (truffé, certes, d’anciens “nationalistes arabes” et de ci-devant staliniens et autres variétés de flics auxquels cette reconversion n’a pas été difficile), qui réprimait en 2019 la protestation sociale des Gazaouis, ceci ne comporte en réalité aucun paradoxe.

Répétons-le : le but N’EST PAS l’émancipation palestinienne, le Hamas N’EST PAS la « résistance palestinienne » (certes, cette nullité politique et nullité tout court qu’est Mahmoud Abbas non plus !).

Mais alors ?

La réponse a été donnée de Téhéran : si Gaza est investi, « personne ne peut garantir le contrôle de la situation et la perspective d’un élargissement du conflit » (ministre iranien des Affaires étrangères).

Cela signifie qu’après la phase 1 de la provocation – les pogroms antisémites masqués en fausse offensive de libération alors qu’il n’a jamais été question d’aller plus loin que sur les lieux des pogroms – la phase 2 serait, une fois l’armée israélienne enfoncée – et embourbée dans Gaza- l’offensive du Hezbollah, des milices iraniennes et peut-être l’implication de l’État failli et meurtrier de Damas, ce qui nous met très près de la guerre directe entre Israël (avec les États-Unis derrière, mais à reculons) et l’Iran (avec la Russie et la Chine derrière, plus un jeu ambiguë de l’Inde à cheval sur les blocs géopolitiques mouvants).

Autrement dit, du point de vue judéo-israélien, RIEN n’est plus dangereux pour la sécurité de la population que l’investissement de Gaza et la réalisation de pas supplémentaires dans le programme de purification ethnique, à dynamique génocidaire, de l’extrême-droite israélienne.

Continuer dans cette voie, c’est ouvrir la porte au programme impérialiste “multipolaire” et contre-révolutionnaire global de l’Iran, qui a avancé depuis des années à travers la contre-révolution et la répression en Irak et en Syrie, et qui signifie pour les Judéo-israéliens leur destruction physique, et pour les Palestiniens la négation définitive de leur existence nationale, par leur transformation en martyrs et en fétiches auxquels toute « agentivité » propre sera refusée.

Un facteur peut-être déclenchant – la goutte d’eau – dans la mise en œuvre de ce programme global impérialiste-barbare par Téhéran, outre la peur d’être renversé par le mouvement « Femme, Vie, Liberté », a peut-être été l’occupation azerbaïdjanaise du Karabagh/Artsakh qui rapproche la possibilité d’une poussée azerbaïdjanaise (NB : ne disons pas azérie, le peuple azéri est à cheval sur l’Azerbaïdjan et l’Iran alors que l’État azerbaïdjanais domine d’autres groupes nationaux) qui établirait une continuité de fait Turquie/Azerbaïdjan.

Téhéran ressent la concurrence du programme panturc, tout aussi menaçant en matière de “purification ethnique” (envers les Arméniens et envers les Kurdes), par rapport à son propre programme de refonte ethno-religieuse de toute la région, qui a commencé par le massacre et la destruction, contre la révolution populaire démocratique, de la majorité de la Syrie sunnite, et se poursuivrait ainsi par la guerre sainte contre Israël.

Netanyahou, déjà détesté en Israël,quelques jours après l’attaque du Hamas, et non pas conforté, va-t-il continuer à foncer tête baissée droit dans le mur de la guerre ethno-impérialiste, conduisant au génocide des Palestiniens et ne protégeant en rien les Judéo-israéliens d’un risque similaire ?

La nation palestinienne étant dans l’immédiat prise en otage et emprisonnée ou paralysée, deux facteurs de paix – et de libération du combat palestinien du carcan sanglant qui l’entrave aujourd’hui peuvent peser dans cette dynamique de guerre mondiale qui montre des dirigeants tout aussi irresponsables que dans la vieille Europe de 1914, et certains pire encore :

– le retournement de la population judéo-israélienne, contre Netanyahou – la composante palestinienne de la population d’Israël aurait là un rôle à jouer également.

– et, au Nord de tout cela, une défaite réelle des armées russes en Ukraine accélérant la marche à la chute du régime de Poutine, qui, n’en doutons pas, a tout fait pour faciliter ce qui est pour lui une diversion bienvenue.

En effet, si le piétinement de Poutine en Ukraine a été un facteur de report du risque de guerre mondiale en mer de Chine, l’ouverture d’une seconde guerre majeure, cette fois-ci au Proche-Orient, en « détournant » Washington, pourrait retourner cette situation et accélérer le risque en favorisant une attaque chinoise sur Taïwan, faisant le parti, risqué et douteux, d’un immobilisme nord-américain.

VP, le 15-10-2023.