Nous publions plusieurs documents relatifs à la vie et au combat de David Hemson, décédé le 7 novembre 2025 à Durban. Nous avons côtoyé le camarade David Hemson dans les réunions et activités du WIN. Il était une personne chaleureuse tout en déployant une grande connaissance et analyse des affaires du monde, il conservait une formidable énergie en dépit de l’avancement de l’âge, restant fidèle aux combats engagés dès sa jeunesse au cœur du régime d’apartheid. Nous adressons nos fraternelles condoléances aux camarades du WIN, à sa famille et ses proches.

Communiqué du WIN

C’est avec une profonde tristesse que les camarades du WIN annoncent le décès récent en Afrique du Sud de notre camarade David Hemson.

Dès les années 1970, il a joué un rôle courageux dans la résistance au régime d’apartheid. En exil à Londres, il a milité au sein du Congrès national africain (ANC), dont il a ensuite été exclu avec d’autres sympathisants de Militant. Emprisonné et torturé au Zimbabwe, il s’est ensuite installé aux États-Unis. Il y a plusieurs années, il a rejoint le WIN et a apporté une contribution déterminante à notre action. Il possédait une compréhension profonde de la crise mondiale du capitalisme et une énergie inlassable pour organiser la solidarité avec les travailleurs en lutte, tissant des liens avec de précieux contacts sur quatre continents. Il y a deux ans, il a conduit une délégation internationale à Durban pour commémorer le 50e anniversaire de son rôle clé dans la grève historique qui s’y était déroulée. Ses interventions politiques lors de nos réunions hebdomadaires de discussion du WIN étaient toujours d’une grande richesse et d’une grande pertinence.

Un véritable camarade. Il nous manquera, mais sa cause triomphera.

Workers International Network (WIN), 08/11/2025.

David lors de la célébration du 50ème anniversaire des grèves de Durban de 1973 qui marquèrent un tournant par le renouveau du mouvement syndical chez les travailleurs noirs, face au régime d’exploitation de l’Apartheid.

Article nécrologique réalisé par Crispin Hemson, son frère.

Christopher David Law Hemson est né à Durban, en Afrique du Sud, le 18 juillet 1945 et y est décédé le 7 novembre 2025, entouré de sa femme Suzanne, de sa belle-fille Soroya et de ses frères Crispin et Jonathan. Ses parents étaient britanniques ; son père avait été envoyé pendant la Seconde Guerre mondiale pour installer des radars à Simonstown et à Durban, et sa mère et sa sœur l’avaient rejoint durant le conflit. Après ses études au Kearsney College, il a intégré l’Université du Natal (aujourd’hui disparue), où il a siégé au Conseil représentatif des étudiants et dirigé le journal étudiant, Dome. Son engagement dans le militantisme étudiant à l’université et au sein de la NUSAS, le syndicat étudiant, l’a amené à côtoyer des figures telles que Steve Biko, Ben Ngubane (avec lesquels il figure sur une photo datant de 1967 ou 1968) et Rogers Ragaven. Il s’est ensuite consacré à la dénonciation des salaires versés par les entreprises britanniques en Afrique du Sud, par le biais de la Commission des salaires qu’il avait fondée avec d’autres étudiants. À partir de 1971, il s’est employé, avec Halton Cheadle, Rick Turner, Foszia Fisher et d’autres, à créer des syndicats pour les travailleurs noirs. Cette intervention fut un succès remarquable ; elle joua un rôle majeur dans les grèves de janvier 1973, qui transformèrent les relations de travail en Afrique du Sud. Les syndicats fondés à cette époque devinrent des éléments centraux du mouvement ouvrier.



Un an plus tard, le gouvernement de l’apartheid le plaça, ainsi que d’autres dirigeants syndicaux, en résidence surveillée et leur imposa d’autres restrictions. Il partit en exil en 1975 et soutint une thèse de doctorat à l’Université de Warwick, portant sur la nature du contrôle de la main-d’œuvre sur les docks de Durban, une thèse qui eut une influence majeure sur les études ultérieures de la société sud-africaine. Son indépendance, partagée avec trois autres militants anti-apartheid, entraîna son exclusion de l’ANC ; il fonda avec eux la MWT (Marxist Workers Tendency) de l’ANC, qui s’associa au mouvement Militant au Royaume-Uni. Il enseigna quelque temps à l’Université de Dar es Salaam, puis épousa Patricia (Trish) Struthers en mai 1982 à Harare, au Zimbabwe, où il travailla comme enseignant et où naquit son premier fils, Jesse, en 1983.

En mars 1985, David fut détenu sans inculpation à la prison de haute sécurité de Chikurubi à Harare, en même temps que Darcy du Toit. Le 18 avril 1985, il fut libéré et expulsé avec sa famille vers le Royaume-Uni, accusé de comploter pour renverser le gouvernement de Robert Mugabe. Son deuxième fils, Benjamin (Ben), naquit au Royaume-Uni en 1987. Au Royaume-Uni, il poursuivit son militantisme au sein du MWT. Fin 1990, après la libération de Nelson Mandela, il obtint l’autorisation du gouvernement sud-africain de retourner à Durban.

Il travailla comme universitaire aux universités du Natal et de Durban-Westville, puis comme chercheur sur la prestation de services publics au Conseil de la recherche en sciences humaines. Il était respecté par de nombreux dirigeants politiques et sociaux dans divers pays pour son indépendance, sa franchise et son patriotisme fervent. En 2006, il épousa l’anthropologue Suzanne Leclerc-Madlala et s’installa par la suite dans le Maryland, où il travailla à l’évaluation de grands projets de développement. Il poursuivit avec énergie son militantisme et ses écrits. Suzanne et lui finirent par s’installer à Cumberland, dans le Rhode Island. En 2024, sa santé se dégrada et il alla rejoindre ses frères à Durban.

Année universitaire 67-68 : Chengiah Rogers Ragaven, en haut à gauche, décédé récemment, alors Président du SRC basé à la Medical School de l’université du Natal, Ben Ngubane et Steve Biko, David Hemson. En bas, Brigitte et John Savage.

Document – La SAFTU présente ses condoléances suite au décès du camarade David Hemson, militant de toujours pour l’émancipation des travailleurs.

La Fédération sud-africaine des syndicats (SAFTU) a appris avec une profonde tristesse le décès, ce matin, du camarade David Hemson. Nous adressons nos plus sincères condoléances à sa famille, ses amis, ses camarades et à tous ceux qui ont partagé son long combat.

Le camarade Hemson était une figure exceptionnelle : intellectuel, militant et organisateur, il a consacré sa vie entière à l’émancipation de la classe ouvrière. De ses premiers engagements dans les années 1970 au sein de la Commission des salaires de Durban et du Fonds général de prestations aux travailleurs d’usine, jusqu’à son rôle de premier plan dans les grèves salariales historiques de 1973, il s’est toujours tenu aux côtés des plus démunis et des plus vulnérables. Contraint à l’exil par le régime d’apartheid, il poursuivit le combat depuis l’étranger et l’approfondit par des recherches approfondies sur le travail des migrants, les dockers et les mécanismes de l’exploitation de classe en Afrique du Sud. Ses écrits et ses travaux universitaires restèrent toujours profondément ancrés dans la réalité quotidienne des travailleurs, des pauvres et des dépossédés. Ils furent des armes dans la bataille des idées.

Même à l’ère démocratique, il refusa de se complaire dans le confort. Il dénonça les échecs du néolibéralisme, la trahison des espoirs de la classe ouvrière et les souffrances persistantes causées par l’effondrement des services publics, la privatisation et la corruption. Il affirmait qu’aucune société ne peut être libre si la classe ouvrière demeure exploitée, divisée et marginalisée.

La SAFTU rend hommage au camarade Hemson, car il incarna ses convictions politiques.

Il croyait au contrôle ouvrier, aux syndicats démocratiques, au socialisme par la base et à la défense inflexible de la dignité des travailleurs noirs dont les luttes ont façonné notre histoire. Il appartenait à la génération qui a relancé l’organisation ouvrière dans les années 1970, et son influence se fait sentir dans chaque avancée du mouvement ouvrier moderne.

Dans notre deuil, nous réaffirmons notre engagement.

La SAFTU se consacre à perpétuer son héritage en :

* reconstruisant le pouvoir des travailleurs sur le lieu de travail ;

* luttant contre l’austérité, la privatisation et la mainmise de l’État ;

* défendant les services publics et les droits des plus démunis ;

* renforçant la formation des travailleurs, la conscience de classe et les alternatives socialistes ;

* construisant l’unité entre les travailleurs, les communautés et les chômeurs.

Le plus bel hommage que nous puissions lui rendre est de poursuivre l’œuvre pour laquelle il a vécu et s’est sacrifié : la création d’une Afrique du Sud où les travailleurs sont organisés, forts et capables de façonner leur propre avenir.

Que le camarade David Hemson repose en paix.

Ses idées et son courage continueront de nous guider. Un communiqué a été publié au nom du secrétaire général de la SAFTU, Zwelinzima Vavi.

Pour toute demande d’information, veuillez contacter le porte-parole national, Newton Masuku :

Newton@saftu.org.za

0661682157

Source : https://saftu.org.za/archives/9162