A quoi a réellement servi la « guerre de 12 jours » de Netanyahou et Trump ?

En Iran, loin d’affaiblir le régime des mollahs, elle a favorisé la répression, au nom bien sûr de la chasse aux agents du Mossad. Cette guerre ne l’a en rien relégitimé, mais lui a apporté un nouveau sursis. Pendant lequel les négociations secrètes avec Washington, dont on peut parier sans risque de se tromper qu’elles n’ont connu aucune interruption à aucun moment, se poursuivent.

Concernant l’état du nucléaire iranien, ni Khamenei, ni Trump, et certainement pas le bodybuildé à la gomme Pete Hegseth, ne sont crédibles, autrement dit : il n’y a strictement aucune certitude sur l’état du nucléaire iranien.

Cette guerre a permis à Netanyahou de poursuivre et d’aggraver le massacre à Gaza, attirant les foules dans le piège des distributions de vivres pour ordonner à Tsahal de leur tirer dessus – car ils en sont là. En Cisjordanie, les commandos fascistes poursuivent la purification ethnique.

Poutine en a tiré profit, lui aussi, pour massacrer des civils en Ukraine, jeter des soldats de Russie (pas forcément des soldats russes) dans la mort, et annoncer l’interdiction de la langue ukrainienne dans les territoires occupés.

La poursuite de la guerre au-delà des « 12 jours » inquiétait la Chine et, du coup, le Pakistan grognait. Taper sur l’Iran sans que Poutine ne réagisse a été, vu son échec contre l’Ukraine, le point le plus sérieux marqué par Washington dans le grand jeu visant à séparer Moscou de Beijing, ce qui, cela dit, est toujours loin d’être fait. Poutine n’ira pas au sommet des BRICS+ à Rio de Janeiro les 6-7 juillet, où Lula était pourtant prêt à l’accueillir et à le sécuriser. Mais Xi n’irait pas non plus – les éléments de crise au sommet en Chine s’accumulent, nous y reviendrons.

Alors, quel a été le véritable résultat de cette guerre pour ceux qui l’ont déclenchée ?

Netanyahou tente sans cesse de relégitimer son pouvoir par la guerre, et du point de vue israélien, le régime iranien annonçant depuis deux décennies vouloir la bombe pour l’envoyer sur Israël, cette guerre là était devenue la plus utile pour lui, la guerre d’anéantissement de la nation palestinienne conduisant aussi, visiblement, à l’autodestruction du peuple judéo-israélien.

Mais le répit est minuscule, et les procédures judiciaires visant Netanyahou reprennent, ce que Trump, en toute ingérence, a déclaré « ne pouvoir tolérer », sic …

Le vrai résultat est donné par ce fait capital : vendredi 27 juin, par 6 voix contre 3, la Cour suprême des Etats-Unis a décidé que « Lorsqu’un tribunal conclut que le pouvoir exécutif a agi illégalement, la réponse de ce tribunal ne peut pas être d’outrepasser lui aussi ses pouvoirs ». On admirera la tournure : la Cour ne dit pas que le pouvoir exécutif n’agit pas illégalement, mais juste que les tribunaux outrepassent leurs pouvoirs lorsqu’ils le sanctionnent ! Et elle poursuit : les décisions des juges fédéraux de portée nationale « excèdent probablement » (sic) leurs pouvoirs !

Cela signifie que les décrets anticonstitutionnels de Trump ne peuvent plus être supprimés par le pouvoir judiciaire, à commencer par son décret du 21 janvier abolissant le droit du sol, à l’encontre de la lettre de la constitution datant de 1789.

Cette offensive d’anéantissement du pouvoir judiciaire fait directement suite au bombardement de l’Iran décidé de manière anticonstitutionnelle sans consultation du Congrès.

Toute la vraie séquence de l’intervention étatsunienne en Iran doit être ainsi éclairée : début juin éclate la crise au sommet, très violente, entre Trump et Musk, qui a explicité sur le devant le scène la question de la destitution de Trump ; l’intervention militaire, certes de petite taille, mais intervention militaire quand même, contre la Californie, est déclenchée dans la foulée ; le 14 juin, plus de 13 millions – insistons-y : plus de 13 millions – de manifestants déferlent aux Etats-Unis sous le mot d’ordre simple et clair, qui résume admirablement les vraies termes de l’affrontement : NO KING, au singulier concernant Trump, ou NO KINGS au pluriel concernant la mafia oligarchique.

La « grosse bombe » sur les sites nucléaires iraniens, dont on ignore les résultats concrets, a donc été en fait une grosse bombe sur la nation américaine, visant à remettre en marche, à marche forcée, le coup d’Etat rampant, de moins en moins rampant, aux Etats-Unis.

On ne peut pas analyser les guerres, révolutions, crises … séparément région par région. L’unité mondiale de la crise globale totale, pendant que le climat grille, doit être le cadre réel de toute analyse.

C’est aussi dans ce procès qu’il faut intégrer la manière dont le sommet de l’OTAN, à La Haye, s’est déroulé, juste entre le « cessez-le-feu » mettant fin à la guerre dite des 12 jours, et la décision de la Cour suprême US.

Tous les commentateurs ont souligné l’apparence triomphale, pour Trump, de ce sommet, contrastant vigoureusement avec le sommet du « G7 » tenu, lui juste avant la guerre « des 12 jours », qu’il avait quitté précipitamment. Avec une servilité courtisane culminant dans le tweet obséquieux de Marc Rutte, secrétaire général de l’OTAN. De sorte que l’annonce de l’engagement des Etats membres d’atteindre les 5% de leurs PIB consacrés aux dépenses militaires en 2035 a pu passer pour un acte d’allégeance à Trump.

Poker menteur. La hausse des dépenses militaires européennes est tout autant conditionnée par l’intégration du fait qu’il y a rupture avec les Etats-Unis et qu’il devient urgent de s’en émanciper, alors qu’en même temps les dirigeants impérialistes européens en sont désolés et ne souhaitent vraiment pas couper les ponts. La conjoncture particulière du sommet de La Haye a permis à tout le monde de faire semblant, le texte de la déclaration finale, signé par les Etats-Unis, commençant par rappeler la fidélité à l’article 5, avec bien sûr à l’esprit une attaque de Poutine sur la Baltique, immédiatement peu probable en raison de l’intensification, qu’il a provoquée, de la pression sur l’Ukraine – mais le risque demeure à moyen terme et Trump n’a évidemment donné aucun vrai signal pouvant faire croire que, le cas échéant, il aiderait la Lituanie, la Lettonie, l’Estonie ou la Finlande !

Cet objectif de dépense est donc officialisé par les principales puissances européennes parce qu’elles craignent d’être lâchées par les Etats-Unis, non parce que Trump le leur demande (Washington, et pas seulement Trump, le leur demande d’ailleurs depuis une dizaine d’années). Il se décompose en 3,5% de dépenses effectives liées à l’OTAN et 1,5% qui sont « à la carte » et, de fait, hors OTAN. L’Espagne a refusé, disant pour sa part vouloir atteindre les 2%. Refus légitime et intéressant, car il est clair que les besoins militaires véritables du moment : drones, batteries anti-aériennes, avions, pour l’Ukraine, et mesures pour casser le siège meurtrier de Gaza, ne nécessitent pas un tel plan à long termes, ni d’alimenter la pompe des trusts de l’armement, ni de tenter de faire, avec Macron, du nucléaire français un pilier de la sécurité européenne.

Sauver les apparences : les dirigeants européens ont fait à Trump le cadeau de la comédie au sommet de l’OTAN, contribuant ainsi au coup d’Etat à peine rampant et bientôt galopant qui est engagé aux Etats-Unis.

Ainsi, pour contre-attaquer sur l’arène de l’affrontement américain, Trump a fait une guerre, reçu des courbettes à La Haye et, de plus, validé un « cessez-le-feu » au président-dictateur ruandais Kagamé, auquel le génocide des Tutsis en 1994 ne confère nulle légitimité pour piller, massacrer et déplacer les populations dans le Nord-Est de la République Démocratique du Congo.

Les marches des fiertés ou « Gay pride », singulièrement celle de Budapest tenue contre l’interdiction par Orban, ce bon ami de Trump, de Poutine et de Netanyahou, qui mène l’extrême-droite européenne raciste et antisémite, indiquent le sens que doit prendre, aux Etats-Unis et dans le monde, la contre-offensive démocratique des peuples.

VP, le 29/06/2025.

Foule à la Gay Pride de Budapest : une claque pour Orban et ses prétentions autoritaires !