A l’issue de la semaine du 15 au 20 juillet, dominée par la réunion de l’Assemblée nationale issue du scrutin des 30 juin et 7 juillet, la situation du NFP au sommet apparaissait paralysée par la confrontation entre la volonté mise en avant de régler la question de la désignation d’une « candidate » aux fonctions de premier ministre (à imposer à Macron) par une réunion des députés NFP tranchant ce sujet d’ici demain, mardi 23, par le PS, EELV et le PCF, et le refus catégorique de LFI, renvoyant désormais explicitement ce règlement à … fin août début septembre !
Les phrases de J.L. Mélenchon : « Je rappelle que ce ne sont pas les élus qui choisissent le Premier ministre, c’est un accord entre des partis politiques. Nous ne participerons pas à un gouvernement qui ne prend pas l’engagement de respecter le programme », ne pouvaient guère masquer leur caractère de prétextes. Depuis quand LFI défend-elle les prérogatives des partis politiques traditionnels ? En 2022, LFI aurait volontiers « dissous » ceux-ci dans la NUPES. Aujourd’hui, où un tel vote des députés NFP – initialement proposé par les « purgés de LFI » – serait un encouragement puissant à sa structuration démocratique de bas en haut, c’est donc devenu un tabou ?
Quant au programme, il a bon dos : ce que veut la base, c’est que soit imposé à Macron un gouvernement qui agisse immédiatement sur l’urgence sociale, hausse des salaires et abrogation de la contre-réforme des retraites.
Comme le cadeau fait à Macron et le soutien de fait au régime de la V° République deviennent de plus en plus voyant, il fallait habiller encore et encore. D’où une interview vendredi au quotidien italien la Republicca, dont on retiendra ici le plus directement essentiel sur la question du pouvoir en France. Elle comporte en outre des chicayas avec F. Hollande et quelques perles telles que « Cela ne me regarde pas », à propos de l’enjeu des présidentielles américaines !
J.L. Mélenchon a évité de répéter que l’exigence d’un gouvernement NFP pouvait bien attendre tout l’été (bien que cultivant l’idée qu’en Europe, la formation des gouvernements prend normalement beaucoup de temps …), insistant au contraire sur « l’urgence » : il ne faut pas « nier la volonté du peuple », « si tout le monde bloque, ça explosera ». Certes, certes … mais qui bloque, ou, disons, qui bloque le plus au moment présent ?
Selon J.L. Mélenchon, c’est bien entendu le PS avec sa candidate « macro-compatible » Laurence Tubiana, en réalité tout aussi ouverte au centre qu’Huguette Bello. Que L. Tubiana ait précisé publiquement qu’elle abrogerait « ou gèlerait » la contre-réforme des retraites en bloquant son application, ce qui constitue un verrou contre tout gouvernement d’union nationale au nom du « front républicain », et que la direction du PS ait conscience que le choix de l’union nationale serait pour elle suicidaire, il n’en a cure : on dirait au contraire qu’il souhaite ardemment que le PS « trahisse ».
Donc, il brandit comme un fétiche le danger mortel que serait un gouvernement d’union nationale, de « façade républicaine », qui ferait le jeu du RN. Dans la réalité, ces mots recouvrent son opposition au combat unitaire pour un gouvernement du NFP.
L’unité contre Macron pour imposer ce gouvernement est une nécessité évidente, délibérément brisée par J.L. Mélenchon. Celui-ci agite le thème de la démission de Macron si celui-ci refuse de nommer un gouvernement NFP. C’est la pointe faussement la plus « radicale » de son interview : évoquer la démission de Macron. Mais Macron, profitant de la division organisée dans le NFP, n’est pas présentement au bord de la démission, mais au bord de la nomination d’un gouvernement à sa guise et, en attendant, il est en train de passer l’été. Grace à qui ?
Chasser Macron serait effectivement la suite logique du combat unitaire et démocratique pour imposer le gouvernement de l’abrogation de la contre-réforme des retraites et de la hausse des salaires. En réalité, J.L. Mélenchon ne prend la posture du Grand Homme invoquant cette démission que pour rassurer ses partisans et donner le change, car il indique que sa perspective politique unique, sa perspective politique centrale, c’est 2027. Et donc que Macron reste d’ici là !
Il insiste en effet sur « le second tour de 2027 » : sans aucun doute pour lui, à ce moment-là, s’opposeront deux projets, d’une part « le mien » (même s’il ajoute « je n’ai pas encore dit que je serai candidat »), d’autre part « celui de la fasciste Le Pen », et lui ou « son projet » gagnera et, ajoute-t-il encore, la France quittera l’OTAN – notons le choix de cette annonce-là : plutôt que la retraite à 60 ans ou la hausse des salaires, c’est l’affirmation d’un impérialisme français « souverain » dans le monde « multipolaire » de Poutine qui est immédiatement prôné, bien que ceci soit aussi un élément de base du « projet » de la « fasciste Le Pen » !
Réfléchissons cinq minutes. Garder Macron tout en parlant bruyamment de sa « démission », lui garantir de ne pas être contraint à nommer un gouvernement NFP, cette politique réelle de LFI nous conduirait en effet à 2027 où, prolongeant la division, elle pourrait en effet conduire à la victoire présidentielle de … Marine Le Pen.
L’autre voie, c’est celle de l’exigence démocratique unitaire. En imposant aux directions du NFP, ce qui exige aujourd’hui de « déconstruire » le soutien réel de J.L. Mélenchon à Macron et à la V° République, de combattre pour imposer leur gouvernement, celui de l’urgence sociale, nous irons de l’avant : soit nous l’imposerons, soit, effectivement, nous pousserons non seulement Macron à partir, mais nous construirons dans le pays les comités de base de la démocratie, pour sortir du régime de la V° République en imposant une assemblée constituante.
Les masques commencent à tomber : J.L. Mélenchon, la direction de LFI et le POI se structurent en garde prétorienne du régime de la V° République au risque d’en confier la direction au RN, tandis que dans tout le pays, l’aspiration à la démocratie et à ce qu’il soit répondu à l’urgence sociale monte, incluant d’ailleurs dans sa masse la base de LFI. Pour aider ce mouvement à gagner et imposer l’unité, faisons tomber les masques !
Comment expliquer à la grande majorité des électeurs qui ont voté avant tout pour un programme que finalement il ne sera appliqué que dans le cadre d’une révision inspirée du je ne sais où avec je ne sais qui. Le socialisme de Hollande et des éléphants avec Gluksman comme ambassadeur est une source de traîtrise qui anéantit la moindre espérance. Le néolibéralisme financier est aussi dangereux que l’autoritarisme du RN. Le nouveau front populaire et son programme social social est soutenu par un électorat qui espère faire revivre le sens profond de notre république laïque – Egalité- Liberté- Fraternité- oui sans compromission.
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C’est étonnant cette propension à déclarer par avance perdue la bataille pour faire changer les choses ! Cette attitude ne sert en fait qu’à justifier le maintien en place de Macron et de son « gouvernement démissionnaire de plein exercice ».
Le prétexte du programme qui « de-toute-façon-ne-sera-jamais- appliqué » est défaitiste, démobilisateur, déroule le tapis rouge pour Le Pen et prépare la défaite de ceux qui n’ont que 2027 dans leur champ de vision.
La tache immédiate est de mettre dehors le dernier gouvernement choisi par Macron. Et d’en mettre un autre en place avec l’exigence de la hausse des salaires et du retrait de la contre-réforme de Macron contre nos retraites.
La démarche « Tout le programme, rien que le programme ! » proclamée par Mélenchon ces jours-ci ressemble furieusement à celle du PCF en 1977-78 quand il torpilla l’Union de la gauche et permit à Giscard de rester en place de 1978 à 1981. Le prétexte à l’époque était déjà un virage à droite du PS !
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