Lors du conflit des retraites, le RN a tenté de faire croire qu’il se battait au côté des millions de salariés en lutte. En fait sa promesse de retraite à 60 ans reposait sur son idée de faire travailler précocement les jeunes en les livrant plus tôt au patronat. Le RN prévoit également la suppression des comptes pénibilité et a voté contre la revalorisation des petites pensions. Les slogans de la campagne des Européennes du style « revenir sur la réforme des retraites » portaient d’ailleurs cette ambiguïté du RN qui a toujours considéré la retraite par répartition comme un système déficitaire qu’il faudrait équilibrer par une relance de la natalité et un contrôle de l’immigration, censés redresser l’emploi.

Mais ce programme trop souvent assimilé à un engagement d’abroger la réforme des retraites est désormais relégué loin des priorités du président du RN, soucieux d’apparaître comme un candidat responsable pour briguer le poste de premier ministre de la Ve République. « Économiquement je suis raisonnable » a-t-il déclaré le 11 juin sur RTL pour tirer un trait sur la position anti réforme des retraites prise naguère par les députés du RN. Aucune disposition sur un retour à 60 ans pour qui que ce soit (longue carrière ou pas, pénibilité ou pas) ne figurera dans le programme des candidats RN aux élections législatives du 30 juin.

C’est à l’heure de la dissolution de l’Assemblée nationale que le RN découvre soudainement que la situation comptable du pays avec un déficit supérieur à 5% du PIB et une dette de 3000 milliards d’euros, n’est pas compatible avec son programme. Et d’autres promesses comme la baisse de la TVA sur le fioul, le gaz, l’électricité qui diminueraient les recettes de 10 milliards d’euros pourraient aussi être passées au crible de la nouvelle posture « raisonnable » des ministrables du RN.

C’est aussi à l’heure des élections législatives anticipées que Bardella réalise que la réforme des retraites imposée par Macron en 2023 va générer un gain de 10 milliards d’euros.

Pour Bardella il est donc temps de revenir aux vraies priorités : immigration, insécurité, sortie du marché européen de l’électricité, simplification pour « nos entreprises », et baisse de la pression fiscale.

Mais d’autre considérations, plus tactiques, motivent également le revirement du RN sur les retraites. Si Bardella veut rallier, au-delà d’Éric Ciotti, des députés LR qui l’aideraient à constituer une éventuelle majorité à l’Assemblée nationale, il est contraint d’adopter quelques fondamentaux des LR parmi lesquels le recul de l’âge de la retraite et plus généralement l’allongement de la durée du travail sont des objectifs prioritaires.

Pour toutes celles et tous ceux qui n’ont pas envie de tourner la page de la contre-réforme, leurs exigences entraînent des conséquences claires : Pas une voix pour Renaissance, pas une voix pour le RN !

Seule une Assemblée souveraine où la gauche sera majoritaire pourra répondre aux revendications sur la durée du travail. En commençant par abroger la loi Macron sur les retraites.

Correspondant syndical.