Dans un interminable discours tenu à côté d’une botte de foin, où le faux pathétique et le vrai grotesque se mêlaient en un faux semblant même pas magistral, Gabriel Attal n’a bien entendu annoncé aucune des mesures d’urgence dont ont besoin les producteurs de nourriture et la population.

De telles mesures, simples à prendre, consisteraient à combiner blocage des prix pour la population et revenu garanti pour les producteurs, avec interdiction aux revendeurs d’acheter les produits en dessous de leur coût de revient et abrogation des dettes des producteurs. Elles appellent un autre gouvernement, représentatif de la majorité, et un autre régime que la V° République, un régime démocratique.

Attal a donc annoncé qu’il recule sur la taxation du gasoil professionnel, et a égrené une série de « chocs de simplification » qui, tous, au nom de la lutte contre « les normes » et « les charges », répondent aux demandes des patrons FNSEA et du financier pollueur qui la dirige, Arnaud Rousseau. Aucune de ces mesures et des « 140 demandes » de la FNSEA ne soulageront les producteurs de nourriture, autrement dit les paysans, toutes retomberont sur eux, sur la population, et sur l’environnement.

Mais le mouvement engagé ne veut pas s’arrêter, car ce mouvement s’est dressé contre la misère et pour la dignité. Il cherche à se centraliser sur Paris, sur le pouvoir, sur le gouvernement, sur l’Élysée.

C’est cela son importance : cette lame de fond partie d’Occitanie a remis au premier plan cette réalité sociale et politique essentielle, qu’en France, la majorité cherche à résoudre sa situation par la généralisation et la centralisation de son combat, qui naturellement tend à affronter le pouvoir central.

C’est ce que les Gilets jaunes ont fait en montant sur l’Élysée, c’est ce que les directions syndicales ont tout fait pour ne pas le faire tout au long du printemps 2023 de défense des retraites contre Macron.

Cette réalité, cette volonté, terrorise autant les chefs de l’organisation corporatiste qu’est la FNSEA, dirigée par les capitalistes, que le gouvernement.

C’est parce qu’ils se protègent eux-mêmes en protégeant le pouvoir que les millionnaires qui tiennent la FNSEA aiguillent systématiquement les mouvements des producteurs ruraux sur des opérations musclées qui ne visent pas le pouvoir, avec sa tolérance. Mais comme le mouvement réel cherche quand même à se centraliser contre le pouvoir, cette combinaison pourrait donner la chose suivante : Paris bloqué !

Sortir de cette impasse exige d’affronter l’exécutif macronien de la V° République. C’est pour cela qu’il est nécessaire et utile que les militants ouvriers se portent à la rencontre des agriculteurs. Oui, certains d’entre eux tiennent des propos « poujadistes » et, sous le couvert du patronat FNSEA, les organisations politiques réactionnaires cherchent à les récupérer, pour les tromper. Et M. Attal a cherché à les dresser contre la jeunesse soucieuse du climat d’une manière inqualifiable.

Mais – moins que dans tous les autres pays européens où le marché soi-disant libre produit des mouvement agraires depuis des semaines – la tonalité réactionnaire peine à s’imposer pleinement, parce que le mouvement réel des producteurs agricoles est le même que celui de l’ensemble du monde du travail, et vient même de lui rappeler que la montée sur Paris pour affronter et défaire le pouvoir central reste une idée vivante et puissante !

Les organisations syndicales de salariés et les forces politiques dites de gauche pourraient affirmer leur volonté de contraindre, avec ces travailleurs, ce pouvoir à céder aux vraies revendications, ou à partir. Ils ne le font pas : c’est cela, uniquement cela, qui permet aux poujadistes et aux réactionnaires d’occuper le terrain et d’essayer de faire leur trou.

Tous ensemble contre Macron, Attal, Arnaud Rousseau et tous les autres, voilà notre intérêt commun !