C’est fois-ci, c’est l’IFOP qui le dit, après bien d’autres : la situation est socialement inflammable, les français ont de plus en plus de mal à boucler leur budget après le 15 du mois, il ne manque plus que l’élément déclencheur et fédérateur pour que ça explose.
Tout le monde ressent ça mais couplé avec cette prise de conscience, ce qui caractérise la situation c’est que personne dans l’opposition syndicale ou politique, ne se prépare et ne veux nous préparer à cet embrasement.
Cela donne une situation étrange.
On a l’impression d’être comme des badeaux passant devant le spectacle de rue des oppositions. On y jette un oeil distrait, parfois un peu accrochés, parfois pas, mais on ne s’arrête jamais très longtemps et sans jamais vraiment y adhérer. On a autre chose à faire de plus important.
L’opposition des directions politiques a beau cracher le feu pour nous intéresser à ses jeux parlementaires, ça nous distrait un moment mais pas plus parce que ça fait longtemps que la démocratie a quitté le Parlement ou les médias et que nous la faisons vivre maintenant en bas, sur les réseaux sociaux et par une vaste reconquête civique des citoyens ordinaires sous de multiples formes quoditiennes, écologiques, féministes, antiracistes…
L’opposition des directions syndicales essaie de nous intéresser à des journées d’actions économiques, émiettées par professions ou nationales mais sans plan, sans suite, sans perspective sinon une vague défense des acquis alors que nous sommes déjà beaucoup plus loin. La plupart savent ou sentent que la crise climatique, la menace de la guerre, l’inflation à des niveaux inédits posent le problème de notre survie, de la survie même des classes populaires comme de la planète et que l’ampleur des luttes, partout dans le monde, du Sri Lanka à la Grande Bretagne, de la résistance populaire dans l’Ukraine en guerre à celle du peuple soudanais en révolution, tout cela pose la question du pouvoir et d’une autre société ou, au moins, la nécessité de poser cette perspective dés maintenant, celle de la construction d’un mouvement social général dans cette direction.
L’expression des mouvements de conscience a toujours du retard sur la réalité, car elle ne s’exprime que par des canaux anciens des vieilles idées et structures construites pour les périodes passées, élections, parlement, médias, partis, syndicats… En même temp, un million de mutineries spontanées, aussi exaltées soient-elles, ne peuvent culminer sans sublimer la fureur dispersée des citoyens en une agitation politique coordonnée. Il faut un événement déclencheur et fédérateur pour que, tout d’un coup, ce qui était latent, souterrain, là mais invisible, devienne l’évidence : non seulement, il faut changer le monde, mais nous le pouvons.
Alors, en miroir de ce potentiel révolutionnaire, parce qu’en face, les classes dominantes et leurs appareils politiques sont infiniment plus conscientes que nous, elles se préparent, mais dans une sorte d’incertitude pleine de panique. On agite les bras, fait de grands discours martiaux, Macron annonce sans crainte qu’il va s’attaquer aux droits des chômeur et à la retraite, mais parle plus qu’il n’agit, contrairement à son premier mandat, parce qu’il est faible, n’a plus de majorité, doit composer avec le RN et LR et n’est pas sûr de mettre le feu au pays plutôt que de casser un peu plus les acquis sociaux.
En Grande-Bretagne, la nouvelle premier ministre a beau affirmer qu’elle va supprimer le droit de grève de la fonction publique, ce n’est que le décès de la reine et le respect de la période de deuil par des directions syndicales monarchiques qui lui permet de faire illusion quelques jours, avant que la reprise de la vague de grève ne montre aux yeux de tous son impuissance. En Italie, cet été, les autorités ont voulu supprimer le droit de grève dans le secteur de la logistique et ont fait arrêter des dirigeants de syndicats de base à cette fin. Mais la riposte populaire, malgré l’absence des directions des grandes confédérations syndicales, a fait remballer son projet au gouvernement. En Allemagne, le patronat a demandé au gouvernement de s’attaquer au droit de grève après la grève des dockers cet été, mais le gouvernement n’a pas osé face à la colère populaire qui s’affiche toutes les semaines dans des manifestations de rue et la peur de mettre de l’huile sur le feu face à un vaste mouvement qui menace dans la métallurgie. En Finlande, le gouvernement social-démocrate vient tout juste de supprimer le droit de grève aux infirmières en lutte, au nom de la sécurité des patients, mais pourrait récupérer en échange un mouvement plus général. Aux USA, Biden a tenté de limiter un peu plus les droits des cheminots du fret ferroviaire, essentiel à l’économie US. Une menace de grève générale des cheminots l’a fait reculer en panique, au moins en partie, craignant de mettre le feu au pays entier malgré les rodomontades du Congrès alliant Républicains et Démocrates pour cette occasion qui promettaient d’interdire ensemble la grève par la loi. Enfin, la Commission européenne, qui réunit directement les représentants de tous les Etats de l’Union, veut faire passer la suppression ou la limitation du droit de grève, mais pour le moment discrètement au détour d’un règlement obscur et très discret.
On le voit, la bourgeoisie se prépare à l’affrontement, elle achète des blindés à ses gendarmes, fourbit des lois répressives, et, dernière innovation, parce que le racisme de l’extrême droite n’a plus autant d’efficacité que hier pour diviser la colère croissante des classes populaires, unit droite et extrême droite comme en Italie et en Suède pour gagner les élections et empêcher que par une victoire de la gauche, les classes populaires prennent un peu plus conscience, même de manière déformée, de leur force montante dans la rue.
La bourgeoisie se prépare mais elle hésite à attaquer et même recule dés que la classe ouvrière montre les dents, parce qu’elle a peur de réveiller le dragon dont elle connaît bien la puissance par son expérience des révolutions passées.
C’est la hausse du prix du ticket de métro qui a déclenché et fédéré le soulèvement populaire au Chili. En France, l’Ifop pense à la réforme des retraites. On verra. Mais Macron est tellement imbu de sa personne et tellement son second mandat sans majorité ni sans avenir est problématique, que c’est bien possible qu’une nouvelle fois dans l’histoire, ce soit la caste aristocratique française et son mépris qui mettent le feu à la poudrière mondiale.
Jacques Chastaing, 18/09/2022
il est temps que se manifeste le refus du capitalisme agonisant qui devient de plus en plus destructeur et agressif.La prise de conscience populaire existe et le peuple sait qu ‘il va devoir payer la liberté et le renouveau de ce vieux monde au prix de son sang et de ses larmes.C’est un boulversement auquel les consciences individuelles se préparent. Les jours à venir seront terribles pour tous.
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On va vers des chocs sociaux, c’est certain !
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IMMINENCE DE LA REVOLUTION
Par Bernard Fischer
Dimanche 18 Septembre 2022
Le site internet d’Arguments Pour la Lutte Sociale (APLS) publiait récemment un message de Jacques Chastaing relatif à la situation politique française et internationale dans lequel il parle, comme d’habitude, de situation inflammable, c’est son titre, d’explosion et d’embrasement.
Jacques Chastaing voit la révolution partout tous les jours, toutes les situations nationales seraient identiques, il fait la comparaison entre le Sri Lanka, la Grande Bretagne, l’Ukraine, le Soudan et de nombreux autres pays.
L’Organisation Communiste Internationaliste (OCI) parlait pendant au moins dix ans dans les années 1970 de l’imminence de la révolution et de l’agonie de la cinquième république. La cinquième république célébrera bientôt son soixante-dixième anniversaire et il y a pour le moins une petite prolongation de son agonie.
Curieusement, le site internet du Club Politique Bastille (CPB) publiait récemment un message de Jacques Kirsner selon lequel « il n’y a pas de crise de la cinquième république. Au contraire de tout ce qui est écrit, depuis près de soixante-dix ans, la cinquième république est solide, elle est robuste et elle s’est adaptée avec souplesse aux circonstances avec le soutien des appareils ».
Robert Duguet écrivait une réponse dont la première phrase est la phrase suivante, « je ne suis bien sûr pas d’accord avec la question de la solidité et de la robustesse des institutions de la cinquième république ».
Le site internet du CPB ne publiait jamais la réponse de Robert Duguet et le site internet d’APLS ne publiait jamais ni le message de Jacques Kirsner ni la réponse de Robert Duguet. Il y a paraît-il de nombreuses visioconférences communes entre le CPB et APLS et ces deux contributions provoquaient certainement de longues discussions passionnantes dans ces visioconférences.
Les sites internet du CPB et d’APLS, c’est un autre de leurs points communs, ne publient jamais non plus aucun des messages politiques personnels de mon blog personnel. C’est la vie. L’abus des visioconférences favorise l’entre soi, ce n’est pas un signe de bonne santé politique. Vous trouverez ci-dessous des considérations supplémentaires relatives aux causes et aux conséquences profondes de ces étranges formes de communication.
Dans son dernier message, Jacques Chastaing parle des partis et des syndicats en général et d’aucun d’entre eux en particulier. Il ne parle pas du tout ni du Mouvement de la France Insoumise (MFI), ni de la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale (NUPES), ni de Jean Luc Mélenchon, ni de la prochaine journée d’action de la Confédération Générale du Travail (CGT) du 29 septembre 2022, ni de la manifestation de la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale du 16 octobre 2022. Sauf erreur, il ne participait pas à la campagne pour le boycott des élections présidentielles et il votait pour Jean Luc Mélenchon sans critique particulière.
Il y a une discussion existentielle à l’intérieur du MFI relatif à son état gazeux, à ses groupes d’action et à d’éventuelles assemblées de circonscription. Immédiatement avant la dernière université d’été du MFI, Clémentine Autain écrivait et diffusait en particulier une longue contribution totalement publique relative à ces questions. L’université d’été n’en parlait bien évidemment pas du tout. Les deux événements les plus importants de la dernière université d’été du MFI étaient les suivants. C’était premièrement l’organisation d’un débat entre Marlène Schiappa et Alexis Corbière. C’était deuxièmement la participation de Rachida Dati à un autre débat. La majorité des auditeurs soulignaient la qualité de ces débats.
Un pas en avant dans le sens des groupes d’action et des assemblées de circonscription ou bien un pas en arrière dans le sens de l’union nationale entre Rachida Dati, Marlène Schiappa et Jean-Luc Mélenchon, si Jacques Chastaing nous parlait de ces questions, cela serait beaucoup mieux pour lui et pour nous.
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Salut Bernard,
Crois tu vraiment que tout serait mieux si Jacques Chastaing nous parlait de l’université d’été du MFI ou de ses groupes d’action plutôt que des mahapanchayats indiens, de la prise du palais de Rajapaksa du Sri Lanka, des manifestations massives au Pakistan, au Bangladesh, au Soudan en Iran, etc. , bref du retour mondial à l’initiative, des exploités et des opprimés du monde entier, tout en gardant un œil attentif sur les grèves de Carrefour ou de Stellantis, sur les mobilisations des hospitaliers ou sur des résurgences gilets jaunes ?
Il ne faut pas voir la révolution partout déclares-tu avec la sagesse des échaudés. Cette prudence ne permet ni de nier l’unité mondiale de la lutte de classe ni de penser que cette formule consiste à considérer toutes les situations révolutionnaires comme identiques. Ce qu’ici personne ne prétend, et certainement pas J. Chastaing, fin connaisseur des spécificités des mouvements de classe en Asie du sud.
Quelques rescapés de l’imminence de la révolution te rejoindront sur la lenteur de l’agonie de la Ve République pronostiquée il y a plus d’un demi-siècle mais le fait que le gaullisme institutionnel ait déjoué les pronostics de l’OCI n’empêche pas, maintenant, le surgissement des masses sur quatre continents, sans oublier les perspectives politiques ouvertes par le recul de l’impérialisme russe en Ukraine. Convenons que cela est plus déterminant que la présence de mesdames Dati et Schiappa à la tribune de la France insoumise et même que la tentative de Macron d’une union nationale dans un CNR.
La « robustesse » des institutions de la Ve république est largement, pour ne pas dire essentiellement, conditionnée par le soutien permanent et de plus en plus spectaculaire que lui apportent les directions syndicales et politiques censées représenter « les travailleurs » et organisant de fait division et inaction au premier rang desquelles la CGT, la CGT-FO, la FI et le PCF. Cela peut-il préserver l’Elysée encore un demi-siècle ?
L’explosion des gilets jaunes montre que les manœuvres en défense de l’exécutif seront de plus en plus difficiles pour les bureaucrates : les mouvements de classe ne passent plus automatiquement par les canaux des organisations traditionnelles. C’est une nouveauté de taille. Le processus de rejet des appareils syndicaux précède leur intégration, encore inachevée, comme corps intermédiaires de la Ve république. De ce point de vue les dates du 29 septembre ou du 16 octobre, pas plus que d’autres journées d’action (dans la santé, dans les transports, etc.) décidées d’en haut, ont peu de chance de centraliser les grèves et de rallier les luttes réelles. Les considérer comme des échéances décisives ou les combattre comme des journées de démobilisation et de division est à peu près aussi vain. On pourrait moins reprocher à J. Chastaing de n’en point parler, qu’ à la gauche syndicale de charger ces journées de porter l’affrontement avec Macron.
Puisque il y a une demande qu’on leur fasse une place les contributions politiques personnelles de B. Fischer peuvent, selon moi, être toutes accueillies dans l’espace dédié aux lecteurs d’APLutSoc. D’autant que Bernard y soulève souvent des questions qui nourrissent nos choix éditoriaux comme c’est le cas récemment pour la Politique militaire prolétarienne, sortie du placard à l’occasion de sa relecture d’une biographie de P. Broué.
Et pour conclure par une note plus personnelle à l’intention de Bernard :
APLutSoc ne s’appelle plus APLS depuis trois ans déjà !
C’est donc APLutSoc qui t’invite au Maltais Rouge le 23 octobre.
Pour un débat en présentiel !
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